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12ème Concours international de piano d’Orléans – Le retour du Japon – Compte-rendu

Au moment où Françoise Thinat, fondatrice du Concours international de piano d’Orléans, vient de passer la main à Isabella Vasilotta à la direction artistique (1), on ne soulignera jamais assez la place originale, le rôle précieux et la forte attractivité de cette compétition biennale dans le paysage musical français.
Une fois décomptés quelques inévitables désistements, 31 candidats étaient présents le 19 février sur la ligne de départ du 12ème Concours. Le jury, présidé par Jean-François Heisser, aura eu pour tâche de les départager au cours de trois épreuves, afin de désigner les trois participants à la finale ; les trois prétendants au très convoité Prix-Mention spéciale Blanche Selva, qui - bien que son libellé ne l'indique guère - constitue le « Grand Prix » .
 

De g. à dr. : Philippe Hattat, Marianna Abrahamyan et Takuya Otaki © Etienne Gaume

Takuya Otaki (29 ans, Japon), Philippe Hattat (22 ans, France) et Marianna Abrahamyan (27 ans, Arménie) se sont confrontés dans un programme composé de deux œuvres imposées (le Concerto pour neuf instruments op. 24 de Webern, avec l’Ensemble Court-circuit dirigé par Jean Deroyer, et Le Carillon d’Orléans, commande du 12ème Concours à Philippe Hersant) et d’une autre partition au choix (Fantasia baetica de Falla, 4ème Sonate de Prokofiev ou Menuet et Toccata du Tombeau de Couperin de Ravel).
 
Les précédentes victoires nipponnes à Orléans remontaient aux débuts du concours (Shinji Urakabe, Prix Blanche Selva en 1994 ; Ami Fujiwara en 1998 - ex æquo avec Toros Can -, Saori Mizumura en 2000). Le Japon est de retour au premier rang cette année grâce à Takuya Otaki (photo), qui décroche d’incontestable façon la récompense suprême. Face aux chausse-trapes rythmiques de la partition de Webern, le pianiste fait montre d’une préparation et d’un sang froid admirables, gages d’une grande liberté du geste. Confortée par une intense complicité avec les instrumentistes de Court-circuit, elle permet au candidat de saisir l’essence de l’Opus 24 avec une netteté, une rapidité, une concentration que l’on pourrait qualifier de calligraphiques. La richesse de sa sonorité fait mouche aussi, là comme dans Le Carillon d’Orléans de Philippe Hersant et, enfin, dans la Fantasia baetica. Par la netteté de ses attaques et l’âpreté de son propos, Takuya Otaki prouve qu’il comprend la dette de cette pièce envers l’univers flamenco.
 
On a déjà eu l’occasion de saluer dans ces colonnes les grandes qualités de Philippe Hattat, à l’occasion de prestations dans le cadre de l’Académie internationale Maurice Ravel de Saint-Jean-de-Luz, et l’on sait le jeu plein d’autorité, de luminosité et de franchise dont il capable. Parcours éprouvant que celui du Concours d’Orléans : visiblement sous le coup de la fatigue, le jeune artiste reste malheureusement très en deçà de son potentiel. Webern manque de relief, de présence agissante du piano. On s’attendait à ce que les accords et les jeux de résonance du Carillon d’Orléans soient pris à bras le corps ; las ! le pianiste nous laisse sur notre faim, comme dans une Fantasia baetica trop impressionniste. Que ceux qui entendaient Philippe Hattat pour la première fois se gardent bien de tirer la moindre conclusion définitive d'une finale guère représentative de sa personnalité. Aléas des concours ...
 
On le mesure aussi au cours de l’épreuve inégale de Marianna Abrahamyan. Son Opus 24, trop statique, trahit d’importants problèmes de mise en place et d’un manque de dialogue avec ses partenaires. La jeune femme fait en revanche merveille dans l’ouvrage de Philippe Hersant, conduit avec beaucoup de plénitude sonore (elle a d’ailleurs obtenu le prix Sacem pour la meilleure interprétation de cet ouvrage). En conclusion la Sonate n° 4 de Prokofiev, pas assez narrative, s’enlise assez vite, avec un dernier mouvement en hypoglycémie.
 
Parvenir en finale du Concours international d’Orléans n’en demeure pas moins déjà une belle performance. On pourra bientôt retrouver les trois pianistes - frais et dispos ! -  aux Bouffes du Nord, le 14 mars, pour le traditionnel concert des lauréats de la compétition. Notez que ce rendez-vous sera précédé (à 15h) par le Concert des lauréats du Concours Brin d’herbe 2015, la version « junior » de la compétition orléanaise.
 
Alain Cochard

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(1) En fait à la direction artistique d’Orléans Concours International (OCI), qui regroupe le Concours international de piano et le Concours « Brin d’herbe », lui aussi dédié à la musique du XXe siècle et contemporaine, mais pour des candidats âgés de 8 à 18 ans.
 
Orléans, Théâtre/ Scène nationale, Salle Jean-Louis Barrault, 28 février 2016.
 
Concert des lauréats du Concours Brin d’herbe 2015
http://www.bouffesdunord.com/fr/saison/55840d925f8f2/laureats-du-concours-brin-dherbe-2015
14 mars – 15h
 
Concert des lauréats du 12ème Concours international d’Orléans
14 mars 2016 – 20h30
 
Paris – Théâtre des Bouffes du Nord
www.bouffesdunord.com/fr/saison/55840e15eb94c/laureats-du-concours-international-de-piano-dorleans-2016
 
Photo © Etienne Gaume

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