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Compte-rendu : Gli Incogniti au 20e Festival Sinfonia en Périgord - Couleur, fantaisie, caractère

Dans un monde de l’interprétation baroque où la distinction entre transmission et clonage ne semble pas toujours très claire, l’exemple d’Amandine Beyer et de son ensemble Gli Incogniti fait chaud au cœur. Si la jeune violoniste, ancienne élève de Chiara Banchini à la Schola Cantorum de Bâle, et ses collègues maîtrisent aussi parfaitement les instruments qu’ils jouent que la syntaxe des textes musicaux abordés, ils n’oublient jamais que tout cela n’est que le point de départ à partir duquel s’affirment la personnalité sonore et la singularité de l’interprétation.
Personnalité sonore ? Gli Icogniti en possèdent une vraie et la parfaite cohésion de la formation ne s’oppose jamais à l’expression des qualités individuelles de ses membres. Plein de relief et de « fruit » le résultat se révèle aussi savoureux que tonique. « A bas les gniou-gniou ! jamais la même teinte, de la forme, de la vie par dessus tout ! » : le mot fameux du bon Chabrier pourrait tenir lieu de devise à ces souriants baroqueux !

De passage à Sinfonia en Périgord à l’occasion des 20 ans du festival dirigé par David Théodoridès, Gli Incogniti signent un programme hors des sentiers battus, partagé entre des pages Purcell et de Nicola Matteis ( ? – 1700). Violoniste compositeur à l’imagination aussi fantasque et exubérante que sa virtuosité était grande, l’artiste italien sut conquérir le cœur des Anglais avec des Ayres for the violin où son lyrisme, son sens du contraste et de l’imprévu font merveille. Découvert à la Schola Cantorum de Bâle grâce à Chiara Banchini, Matteis un auteur qu’Amandine Beyer défend avec passion - un très beau CD unanimement acclamé en témoigne (Zig Zag). Son concert à Sinfonia en Périgord le fait dialoguer avec deux Sonatas of Three Parts (nos 6 et 10) et des pièces pour clavier de Purcell (magnifiquement interprétées par Anna Fontana).
Impossible de résister à la façon dont Gli Icogniti se régalent de morceaux tirés d’une Suite en la mineur et de deux Suites en do majeur de l’Italien. Jamais pédante, la science de Matteis est tout au service de l’image, de la fantaisie ; ce que comprennent les archets virtuoses, tendres et gourmands d’Amandine Beyer et de son excellente consoeur Alba Rocca. De l’ample respiration des préludes au propos tellement suggestif de l’Aria Burlesca, de la Giga « Al genio Turchesco » ou encore des étonnantes Diverse Bizarrie sopra la Vecchia Sarabanda o pur Ciacconna tout vit et – qualité ô combien rare… - s’émerveille. En aussi bonne compagnie, Purcell ne peut avoir que le sourire : puisse Gli Icogniti s’intéresser rapidement à cet auteur au disque !

A propos de transmission, une excellente nouvelle : Amandine Beyer reprend, avec sa collègue Meula Shayegh, le flambeau de Chiara Banchini à la Schola Cantorum de Bâle.

Alain Cochard

Festival Sinfonia en Périgord, Abbaye de Chancelade, 26 août 2010

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Photo : DR
 

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