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Compte-rendu : Jean-Paul Imbert et le Quintette Anacrouse au Val-de-Grâce - Réjouissante diversité


Sous l'impulsion de Hervé Désarbre, titulaire de son orgue Cavaillé-Coll (construit en 1853 pour le Panthéon, transféré à l'église de l'hôpital militaire en 1891), le Val-de-Grâce offre une double saison musicale : les auditions d'orgue du premier dimanche de chaque mois à 17 h 30 et les concerts du premier samedi à 18 h 30, tous à entrée libre. Le pivot de la programmation est naturellement l'orgue, relevé par Delangue et Hurvy en 1993, installé à même le dallage dans la chapelle Sainte-Anne ou « chœur de la reine », le public prenant place au pied du somptueux baldaquin, dans le vaste espace circonscrit par la coupole de Mignard.

Cet emplacement, sur le plan acoustique, n'est certes pas optimal, le son jaillissant de l'espace relativement confiné de la chapelle pour se trouver brusquement happé par le volume considérable de la croisée. Les conséquences musicales sont toutefois moins négatives qu'on ne le redouterait de prime abord, même si l'orgue sonne à une distance semblant plus grande que ce n'est le cas, avec d'ailleurs un certain mystère non sans beauté, puissance et qualité des timbres atteignant le public sans perte excessive de lisibilité. Musicalement d'une belle diversité, la programmation fait également appel à d'autres instruments en dialogue avec l'orgue.

Ainsi le dimanche 7 novembre, Hervé Désarbre ayant convié Jean-Paul Imbert (photo), organiste du fameux orgue contemporain de l'Alpe d'Huez, signé Kleuker dans un buffet en forme de main, et professeur à la Schola Cantorum (Paris), et le Quintette Anacrouse (flûte, hautbois, clarinette, cor, basson). Ce type de formation est une invitation permanente à la transcription, comme à l'époque de Mozart où toutes sortes d'ensembles adaptaient avec délices ses ouvertures d'opéras – Mozart qui ouvrait le programme avec un arrangement, d'emblée, de la Sonate d'église KV.329 « avec orgue concertant ».

Le ton était donné, enjoué, lumineux, riche de timbres, de dynamique, d'esprit – celui d'une formation certes de chambre mais qui, accompagnée et soutenue par l'orgue, peut tout à coup changer sensiblement de proportions, ainsi dans le Ricercare a 6 de L'Offrande musicale de Bach, aussitôt suivi de la Petite offrande musicale de Nino Rota – le concert abonda en contrastes joliment enchaînés : Rameau, Chabrier, Mendelssohn, Ernesto Lecuona, Morton Gould, Scott Joplin… L'orgue seul était illustré par Cinq Improvisations de vêpres de Pierre Cochereau (reconstituées par Jeanne Joulain), bref survol de la palette de l'orgue, et le Troisième Choral de Franck, une gageure sur un instrument de taille modeste et dans cette configuration acoustique. Sur un tempo enlevé mais clair, prenant nombre de risques assumés, Imbert en offrit une restitution dense et pleine de panache, faisant de ce monument l'épicentre du concert.

Michel Roubinet

Paris, dimanche 7 novembre 2010, église du Val-de-Grâce

Sites Internet :

Auditions d'orgue du Val-de-Grâce

http://www.valdegrace.org/pages/page33.html

Jean-Paul Imbert

http://imbertjeanpaul.fr/

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Photo : DR

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