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Damien Guillon en récital à Gaveau - Le bonheur du contre-ténor à la française - Compte-rendu

Formé à la maîtrise de Bretagne, Damien Guillon est beaucoup plus qu'une voix prometteuse dans le concert des XVIIème et XVIIIème siècles, lui qui, à la Schola Cantorum de Bâle, a su tirer le maximum de l'enseignement d’Andreas Scholl, dont il partage la fluidité de timbre et le souci presque maniaque du bien-dire et du style.

Précisément, le temps de l'accomplissement est venu pour ce musicien pluraliste (il est aussi organiste et claveciniste ) à l'aise dans un riche répertoire vocal, des songs élisabéthaines et jacobéennes aux grandes machines de l'âge baroque : passions, cantates et oratorios de Bach, opéras de Haendel, masques de Purcell, etc., sans oublier la leçon d'humanité venue d'Italie, mère de toute modernité en musique, via le rôle fondateur du drame lyrique.

Aussi bien, le récitaliste vient de célébrer exclusivement l'Italie dans une Salle Gaveau presque comble. Plus exactement, l'Italie du second Baroque dont les foyers furent Venise, Rome et Naples, ces capitales de la vocalité à la croisée du Settecento, avec une belle moisson de talents majeurs à honorer. A commencer par Giovanni Battista Bononcini, né à Modène et formé à Bologne, avant d'être au service de l'empereur Léopold 1er à Vienne, puis de gagner Londres en 1720 où il fut, plusieurs années durant, le rival de Haendel dans le domaine de l'opéra seria jusqu'à ce qu'une accusation de plagiat, mêlée aux querelles de préséance entre prime donne à la mode (la Bordoni, la Cuzzoni) ne l'oblige à quitter l'Angleterre pour mourir presque oublié dans la ville des Habsbourg en 1747. .

Pour autant, le défi belcantiste tenait surtout, l'autre soir, dans les pages de Vivaldi et d'Alessandro Scarlatti, chefs-d'oeuvre de la cantate profane. Trois joyaux lyrico-dramatiques où notre haute-contre campait, si j'ose dire, sur ses terres favorites, porté par un chant tout ensemble subtil et fervent. Ainsi de la fameuse Cessate omai, cessate du Prêtre Roux qui tourne au souvenir vrillant, non pas lecture, mais peinture et exaltation du mot doloriste, la technique sans faille du soliste ne cessant d'y servir les intuitions du dramaturge, sans oublier son rôle heureux comme chef à la tête de l' ensemble instrumental Le Banquet Céleste (ardente « Trille du Diable » de Tartini, entre autres, sous l'archet de Baptiste Lopez).

Roger Tellart

Paris, Salle Gaveau, 2 mai 2012

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Photo : DR
 

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