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La Petite Renarde rusée et Conte de Liberté / Journal d’un disparu mis en scène par Louise Moaty (tournée Arcal ) - Aventures et Disparitions

D’où proviennent Les Aventures de La Petite Renarde rusée ? D’une publication illustrée, le journal Lidové noviny de Brno auquel Janáček était abonné et qui publia entre avril et juin 1920 le roman de Rudolf Těsnohlídek, Liska  Bystrouska  abondamment accompagné par les dessins évocateurs de Stanislav Lolek, si nombreux qu’ils formaient une véritable bande dessinée : les voyant, Janáček eut sous les yeux son opéra pour ainsi dire composé. 
 
Il lui fallait trouver un matériau musical pour évoquer cette Moravie des bois et des prés. Il herborisa donc parmi les recueils de chansons populaires de Bohème et de Moravie, les évoquant plutôt que les citant, créant un folklore imaginaire et les parant d’un orchestre évocateur, le plus inventif qui ait jamais coulé de sa plume.
Il se composa sur mesure son propre livret après avoir passé accord avec Rudolf Těsnohlídek  – le romancier recevrait dix pour cent des droits -  et commença à imaginer la langue sonore des animaux de la forêt, les distribuant entre enfants et adultes. Les créations à Brno (6 novembre 1924) puis à Prague (18 mai 1925, l’occasion pour Janáček d’apporter quelques corrections) connurent un franc succès qui demeura pourtant sans lendemain. Les éditions Universal ne crurent guère au potentiel de l’œuvre et lui prédirent une médiocre carrière en Allemagne malgré la belle traduction de Max Brod qui fut créée en février 1827 à Mayence, la seule reprise de l’ouvrage du vivant du compositeur.
 
Aujourd’hui, Les Aventures de la Petite Renarde rusée sont devenues avec Jenůfa l’opéra le plus fêté de Janáček. Catherine Kollen, directrice de l’Arcal, a confié à Louise Moaty (photo), auteur d’une sobre et émouvante mise en scène du Roi d’Atlantis reprise à Angers-Nantes Opéra voici peu, un doublé Janáček : dix représentations de La Petite Renarde rusée, mais aussi une représentation du  Journal d’un disparu que Janáček ne pensa pas initialement pour la scène, en fait un cycle de mélodies sur des poèmes en dialecte valaque d’un auteur demeuré anonyme narrant les amours étranges d’un jeune fermier séduit par une gitane qui le fera mystérieusement quitter son village.
 
Janáček avait découvert ces poèmes en mai 1916, ils avaient été publiés comme La Petite Renarde rusée dans le Lidové noviny. Au mois de juin de l’année suivante, le compositeur s’éprit d’une jeune femme de trente-huit ans sa cadette, Kamila Stösslová et c’est alors qu’il mit en musique les poèmes. Le Journal d’un disparu peut donc être considéré comme une mise en abyme de l’histoire d’amour vécue par le compositeur.
 Si l’effectif original du Journal d’un disparu  - ténor,  mezzo soprano, chœur de femmes à trois voix, piano – sera respecté, on découvrira l’ouvrage mêlé à des textes de la poétesse rom et polonaise Bronislawa Wajs-Papusza (1908-1987) dans un spectacle intitulé Conte de Liberté / Le Journal d’un disparu (1).
Les Aventures de la Petite Renarde rusée seront pour leur part présentées dans la réduction d’orchestre à seize instruments réalisée par Jonathan Dove à la demande des Editions Universal en 1998, travail si parfait qu’il a entraîné nombre de créations de l’ouvrage dans des théâtres qui ne pouvaient accueillir jusque-là l’orchestre fourni exigé par l'auteur.
 
Pour les spectacles à vocation itinérante de l’Arcal, le choix était évident, comme celui de Louise Moaty et de son équipe qui prônent un théâtre de tréteaux, aux moyens légers. La vidéo et les lumières, respectivement signées de Benoît Labourdette et Nathalie Perrier, joueront un rôle essentiel dans ce projet Janáček.
Il faudra surveiller de près dans La Renarde le Garde Forestier de Philippe Nicolas Martin et la Renarde de Noriko Urata qui promettent beaucoup, Laurent Cuniot dirigeant tout ce petit monde (dont les musiciens de TM+) avec la vitalité et la poésie qu’on lui connaît. Quant au « Disparu » il reviendra à Paul Gaugler qui depuis son Octavio des Fêtes Galantes pour William Christie a fait bien du chemin : il est l’un de nos plus beaux jeunes ténors, on espère qu’il saura trouver  les élans et les désespoirs de ce voyage envoûtant.
 
Jean-Charles Hoffelé

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(1) www.renarde.arcal-lyrique.fr/le-journal-d-un-disparu/le-projet-scenique/conte-de-liberte-journal-d-un-disparu-par-louise-moaty
 
Janáček - La Petite Renarde rusée
15 et 16 janvier 2016 – 20h30
Nanterre – Maison de la Musique
www.concertclassic.com/concert/leos-janacek-louis-moaty-tm-la-petite-renarde-rusee
 
Représentations suivantes à Saint-Quentin-en-Yvelines (19 février), Reims (26 février), Besançon (16 mars), Massy (14 et 15 avril), Sablé-sur-Sarthe (23 avril), Le Mans (29 et 30 avril). www.arcal-lyrique.fr/spectacle/la-petite-renarde-rusee
 
Janáček ( + poèmes de Bronislawa Wajs-Papusza) : Conte de Liberté/ Journal d’un disparu 
6 février 2016 – 20h 45
Beynes - La Barbacane

30 et 31 mars 2016
Paris - La Péniche Opéra
www.arcal-lyrique.fr/spectacle/conte-de-liberte-journal-dun-disparu

Photo Louise Moaty © Nathaniel Baruch

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