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Louis Langrée et le Cincinnati Symphony Orchestra à la Seine Musicale – Nouveaux mondes – Compte-rendu

Après le Festival d’Edimbourg, les Proms de Londres, San Sebastian, Eindhoven, Utrecht, Anvers, la tournée européenne du Cincinatti Symphony Orchestra et de Louis Langrée (photo) s’achevait à la Seine Musicale. Moment impatiemment attendu, il aura permis de retrouver une phalange d’exception visiblement stimulée par le grand périple qu’elle vient d’accomplir, mais surtout forte de l’acquis du travail sous la direction du chef français depuis 2013 (L. Langrée a été renouvelé en février dernier pour un troisième mandat à la tête du CSO jusqu’en 2022). Dire que le courant passe entre le maestro et les musiciens américains est un faible mot quand il est donné de mesurer en concert l’intensité de leur relation, sur un plan tant humain que musical.

On guettait évidemment avec une curiosité toute particulière le second programme du CSO, qui incluait la création mondiale de l’édition critique (établie par le musicologue Mark Clague) d’Un Américain à Paris de Gershwin. En guise prélude, Langrée a placé un ouvrage d’un des plus célèbres compositeurs américains d’aujourd’hui : Short Ride in a Fast Machine (1986) de John Adams. Une course brève et effrénée que le CSO assume un aplomb, un brio et un tonus rythmique proprement bluffants.

© CSO

Mais la surprise reste à venir avec fameuse pièce de Gershwin que le temps et les mauvaises habitudes avaient encombrée d’un fatras de scories - nettoyées par les soins de Marc Clague ! Grâce à lui, Un Américain à Paris retrouve les couleurs de sa jeunesse ; une fraîcheur des teintes, une finesse des détails, une vibration lumineuse qu’on ne lui connaissait pas, ce d’autant que Louis Langrée exploite la fantastique palette offerte par sa formation (mention spéciale aux saxophonistes !) avec une imagination de chaque instant – et un plaisir gourmand ! Avant la « Nouveau Monde » de Dvorak, un nouveau monde sonore se révèle au public grâce à la salutaire entreprise du musicologue américain, servie par une baguette inspirée.

La 9ème Symphonie de Dvorak : rien de tel qu’un opus aussi rebattu pour jauger des qualités d’une phalange et de son chef. Pas une « Nouveau Monde » de plus avec Louis Langrée, mais une interprétation engagée, foisonnante de timbres, que sert un orchestre aux cordes d’une souplesse et d’une rondeur admirables, aux bois fruités, aux cuivres lumineux et exempts de tout clinquant. On n’est pas près d’oublier le feu narratif, l’ample respiration, la poésie intense (quel fabuleux Largo...) de cette Symphonie en mineur ... Le public non plus, enthousiaste, et gratifié en bis de l’ouverture du Candide de Bernstein, toute de finesse et d’esprit. Hats off !

On espère retrouver sans trop attendre le Cincinnati Symphony Orchestra en France. Quant à Louis Langrée, il sera dans la fosse de l'Opéra-Comique en fin d'année pour le délectable Comte Ory (1) de Rossini (du 19 au 31 déc.), à la tête d'une formation qu'il connaît bien : l'Orchestre des Champs-Elysées.
 
Alain Cochard

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(1) www.opera-comique.com/fr/saisons/saison-2017/comte-ory

Boulogne, La Seine Musicale, 19 septembre 2017 (concert de 16h 30)

Photo Louis Langrée © Benoît Linero

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