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Mort de Michel Schwalbé (1919-2012) - Le violon solo français de Karajan - Hommage Concertclassic

Le violoniste français Michel Schwalbé, le bras droit de Karajan pendant un quart de siècle à la Philharmonie de Berlin, est mort à l’âge de 93 ans dans la capitale allemande où il s’était retiré. La nouvelle fera plus de bruit en Allemagne, où l’on sait reconnaître la vraie valeur musicale, qu’en France où le petit cercle franchouillard du Conservatoire de Paris l’avait longtemps tenu à l’écart comme un pestiféré qui aurait trahi sa patrie pour faire carrière avec un Karajan au passé sulfureux…

Michel Schwalbé, né en 1919 à Radom en Pologne, illustrait pourtant à merveille la permanence d’une culture européenne, au-delà des frontières politiques. Il avait suivi à Paris un oncle diplomate lui permettant de compléter des études musicales commencées dans l’entre-deux-guerres à l’Académie de Varsovie où il fut l’un des derniers représentants de la célèbre école de violon du Hongrois Leopold von Auer. A Paris, c’est l’école franco-belge qui l’influença lorsqu’il travailla avec Georges Enesco, Pierre Monteux et surtout Jules Boucherit, l’un des plus fameux professeurs de violon du Conservatoire de Paris.

Ce caractère bien trempé s’engagea dans la guerre en tant que soldat français. En 1945, il a terminé ses études, mais pas encore vraiment commencé sa carrière ! Furtwängler et Karajan, réfugiés en Suisse – comme lui, mais pour des raisons opposées ! – l’entendent et le dirigent comme violon solo de l’Orchestre de chambre de Lausanne et de celui de la Suisse romande. C’est l’époque où Schwalbé succède à Joseph Szigeti à la classe de virtuosité du Conservatoire de Genève et où il fonde à Zurich le quatuor à cordes qui porte son nom. Il faudra trois ans à Karajan pour parvenir à l’arracher à la Suisse et l’engager comme Konzertmeister à la Philharmonie de Berlin en 1957.

Se chargeant de nombreuses répétitions, et pas seulement des inoubliables solos de La Vie d’un héros de Richard Strauss, Schwalbé devint le bras droit du chef autrichien l’aidant dans sa conquête de l’empire de la musique classique occidentale, notamment dans sa politique discographique. Le premier Konzertmeister de la Philharmonie de Berlin, qu’on croisait tous les étés au Festival de Salzbourg, menait aussi une brillante carrière pédagogique au Mozarteum de Salzbourg, mais aussi à l’Académie de Berlin où il fut le premier Français à enseigner. Ca ne se pardonne pas ! Et les jaloux de tous poils réussirent à lui faire barrage lorsqu’à sa retraite il souhaita revenir à Paris pour ouvrir une école supérieure de cordes.

Unis dans la même sainte colère, Marcel Landowski et Maurice Fleuret firent alors le ménage au Conservatoire … Trop tard hélas, Schwalbé avait regagné Berlin. Il enseigna à Moscou ainsi qu’à la Juilliard School de New York, mais ne revint jamais à Paris sauf en visite privée chez la violoniste Denise Soriano, la veuve de Jules Boucherit. Ses enregistrements attesteront longtemps de l’exigence et de la culture de ce grand musicien qui avait choisi la France, mais que la France avait rejeté. Il en avait vu d’autres celui dont le nom portait témoignage des errances de sa famille. Ainsi tenait-t-il au « é » de Schwalbé, cette orthographe catalane datant l’époque où les siens avaient été chassés d’Espagne par Isabelle la catholique...

Jacques Doucelin

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Photo : DR
 

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