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Nohant Festival Chopin – De belles découvertes et... une invitée surprise ! – Compte-rendu

Le Festival de Nohant fête ses 50 ans et sa longue histoire a été marquée par la venue dans la Bergerie du domaine de George Sand de tout ce que le gotha du piano comporte de légendes.(1) Nohant offre en effet chaque année, sous la présidence d’Yves Henry, une riche programmation concoctée par Jean-Yves Clément, mais rayonne également d’une dense activité entre conférences, master classes et animations qui raniment la mémoire des temps glorieux du romantisme.
 
Artiste prometteur, le Canadien Charles Richard-Hamelin(photo) (2ème Prix et Prix Krystian Zimerman au dernier Concours Chopin de Varsovie) offre un récital entièrement consacré au compositeur polonais. Sa maîtrise et son imagination frappent d’emblée dans la Troisième Ballade par la profondeur du toucher, le sens de la narration et les inflexions vocales. On retrouve ces mêmes qualités dans la Polonaise-Fantaisie, comme improvisée et conduite avec un art souverain de la structure. Ces doigts ailés et inspirés donnent du corps à l’Introduction et Rondo op. 16, par-delà le caractère brillant du morceau.
Après l’entracte, les quatre Mazurkas op. 33 fleurent bon le terroir par le rythme bien scandé, la justesse d’accent et une simplicité expressive d’un naturel confondant.
La Sonate n° 3 prend une dimension visionnaire avec un engagement total qui se manifeste dès l’affrontement des deux thèmes du premier mouvement et trouve dans le final une puissance tellurique bien que le tempo paraisse quelque peu pressé. Le rare Rondo op. 51 n° 1 de Beethoven joué en bis avec joie, humour et humanité complète avec bonheur ce concert de haute volée.
 
Le lendemain, la prestation du jeune Singapourien Ronald Noerjadi (Prix Alfred Cortot 2016) impressionne plus par la puissance du geste que par la tendresse (Tableaux d’une exposition) et celle Eric Lu (18 ans), 4ème Prix du Concours Chopin 2015, malgré une belle respiration dans les 24 Préludes op. 28, ne réussit pas à captiver dans les 4 Impromptus D. 899 de Schubert et moins encore dans la Sonate n° 9 de Mozart, trop sèche.
 
Maria João Pires
Maria-João Pires © Harald Hoffmann & DG
 
Maria-João Pires est l’invitée surprise de la soirée, venue soutenir l’un de ses disciples, Julien Brocal, à l’origine prévu seul sur scène. La Fantaisie à 4 mains de Schubert montre les deux interprètes en parfaite osmose, tandis que les 3 Nocturnes op. 9 de Chopin sous les doigts de Pires prennent une dimension céleste accordée à l’atmosphère de la Bergerie. L’exécution engagée de deux des Sept Préludes op. 40 de Sergueï Bortkiewicz par le jeune Brocal révèle un véritable tempérament mais, pour ce qui est des œuvres de Chopin, la Sonate « Funèbre » s’éternise, tout comme les Nocturnes op. 15, 48 et 62.
 
Cerises sur le gâteau, les conférences de Jean-Jacques Eigeldinger (« La main de Chopin. Documents nouveaux ? ») et de Jean-Yves Clément (« Glenn Gould romantique ? ») apportent un complément de choix à un week-end pianistique très fréquenté.
 
Michel Le Naour
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(1) Pour son jubilé, le Festival de Nohant annonce la publication au cours du dernier trimestre de 2016 de deux double-CD (chez Soupir Editions). Chaque référence comportera un récital d’un grand interprète disparu et des extraits de concerts récents de jeunes talents. Le volume I sera organisé autour du dernier récital d’Aldo Ciccolini à Nohant, en juin 2014, le second à partir d’un récital donné en 1982 par Yuri Egorov. Une souscription permettant d'acquérir ces précieux documents à tarif préférentiel a été lancée : www.festivalnohant.com/fr/events/archives-musicales-du-nohant-festival-chopin/

 
 
Nohant, Bergerie-Auditorium Frédéric Chopin, 23 et 24 juillet 2016
 

 
 Photo Richard-Charles Hamelin © Elisabeth Delage

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