Journal
Orchestre national d’Île-de-France – Le dynamisme en action
Mettre en lumière les solistes
Le commencement de l’année 2020 aura ainsi été marqué par le lancement de la collection « Solo » dont le premier volume est consacré au percussionniste Georgi Varbanov (2), 1er solo de la phalange francilienne. « On parle peu des solistes qui composent l’Orchestre, qui le font vivre, l’animent, le dessinent par leur travail quotidien, constate Fabienne Voisin (photo), directrice générale de l’Ondif. La collection « Solo » traduit la volonté de mettre en lumière des solistes, comme c’est le cas avec Georgi Varbanov, mais aussi des ensembles de musique de chambre constitués au sein de l’Orchestre ».
Particulièrement original, le programme de G. Varbanov relève plutôt du duo, entre le marimba et la voix de Sonya Mellah, animatrice indissociable de Fip, radio sur laquelle elle intervient depuis de nombreuses années. Une voix chère au cœur de G. Varbanov, musicien d’origine bulgare qui, au moment de son installation chez nous, a beaucoup écouté Fip pour parfaire son français. Son disque mêle des textes de sa main, dit par S. Mellah, à des pages de sa composition, de Bach, Takagatsu Muramatsu, Matthias Schmitt, Dave Samuels ou John Psathas, sans oublier deux danses traditionnelles bulgares. « Solo » permet aussi « la poursuite de la collaboration avec la label #NoMadMusic, partenaire extrêmement solide, confie F. Voisin, qui fait preuve d’énormément de créativité et nous accompagne là comme pour ce qui concerne les enregistrements de l’Orchestre. Nous n’avons pas encore pris de décision quant aux prochains disques de la série « Solo ». Les musiciens sont force de proposition. Il ne s’agit pas d’enregistrer les Suites de Bach, mais plutôt de découvrir des répertoires méconnus et favoriser la création. »
Côté orchestral, le premier disque signé Case Scaglione reprend le magnifique programme wagnérien de la rentrée dernière (avec les voix de Michelle DeYoung et Simon O’Neill). Mis en boîte dans la foulée des concerts, il sortira au début de la saison prochaine. Un disque évidemment réalisé dans le Studio dont dispose depuis 2018 la Maison de l’Orchestre à Alfortville.(2)
Le Studio : un exceptionnel outil
« Ce Studio, précise F. Voisin, avait pour vocation initiale d’accompagner la Région Île-de-France, première région française investie au côté du milieu du cinéma. 50% des tournages français et 70% des tournages étrangers se déroulent en Île-de-France, territoire d’une grande attractivité par sa diversité, entre zones urbaines, zones agricoles et nombreux lieux patrimoniaux. Nous voulions accompagner cette démarche et nous avons constaté que la plupart des enregistrements des musiques des films tournés en Île-de-France étaient réalisés à l’étranger. L’objectif premier a été, pour Alexis Labat, administrateur de l’Orchestre, et moi-même de dessiner le studio qui permettrait d’arrêter cette hémorragie et de garder sur le territoire francilien, français de manière plus générale, les compétences que nous avons, qu’il s’agisse des compositeurs mais aussi de tous les métiers du son. Nous voulions concevoir un outil qui leur permette d’enregistrer aux portes de Paris. Il fallait bien sûr aussi que l’Orchestre puisse y réaliser ses propres enregistrements. »
Un gros travail en amont aura été nécessaire pour définir les caractéristiques de l’outil à mettre au point : « Sur quatre ans, détaille F. Voisin, nous avons rencontré près de 70 professionnels, aidés dans nos démarches par Mireille Faure et Alix Ewald, deux ingénieurs du son qui travaillent assez régulièrement avec nous. Nous avons proposé le projet à la Région Île-de-France qui nous a accompagnés dans la mise au point d’un studio, très bien équipé. Il peut rivaliser avec les meilleurs par le confort d’enregistrement qu’il offre - il se compose d’un grand auditorium ; la pièce dans laquelle l’Ondif travaille, et d'un autre espace, plus petit, qui peut lui servir pour la voix par exemple. »
Outre des musiques pour le cinéma ou l’animation (dont la musique de Mathieu Lamboley pour Minuscule 2), une bande-son pour le Parc Astérix et divers jeux vidéos, le Studio est également loué par de nombreux professionnels, du classique aussi bien que de la pop : de Stéphane Degout à Michel Jonasz, des Métaboles aux Cris de Paris, d’Alexandra Kurzac à Bruno Fontaine ou à l’Arpeggiata, bien des artistes et des labels ont déjà fait usage du lieu depuis son ouverture.
Concours Île de créations : l’heure de la maturité
L’élan et les succès présents de l’Orchestre national d’Île-de-France doivent beaucoup à l’investissement d’Enrique Mazzola durant les années passées à la tête de la formation. On doit ainsi à l’ancien directeur musical le lancement en 2013 d’ «Île de création », un concours de composition dont le succès est allé croissant. « Le but est de favoriser la rencontre des jeunes compositeurs avec le public, mais aussi avec un orchestre en leur donnant la possibilité de composer pour lui, rappelle F. Voisin. Une bonne trentaine de candidats, de diverses nationalités se sont présentés à la 8ème édition, preuve que le Concours est arrivé à une forme de maturité. »
Le Concours a confié à Guillaume Connesson (parrain de la 8ème édition), Matteo Franceschini, Hèctor Parra et Case Scaglione la sélection des finalistes (les compositeurs devaient cette fois présenter une œuvre, de 10 minutes en cinq mouvements de 2 minutes, pour violoncelle et orchestre, ce du fait de la présence d’un violoncelliste, le remarquable Victor Julien-Laferrière, comme artiste en résidence à l’Ondif cette saison.) Le lauréat sera choisi parmi trois finalistes – Julien Giraudet ( F., 32 ans), Maarten Lingier (Belg., 26 ans)et Maria del Pilar Miralles Castillo (Esp., 22 ans) – au terme de l’épreuve conclusive du 30 avril (au Centre des Bords de Marne du Perreux) et le public, très fidèle à cet événement, aura comme toujours la possibilité de décerner son prix.
Le Jeune Public, cible prioritaire de l’action culturelle
Autre aspect du mandat d’Enrique Mazzola, la politique en direction du Jeune Public a connu un formidable essor. Il ne risque pas de retomber avec l’arrivée du nouveau directeur musical. « Nous avons la chance, avec Case Scaglione, d’avoir un chef qui a fait ses armes aussi en matière d’action culturelle lorsqu’il était assistant au Philharmonique de New York, se félicite F. Voisin. »
Si elle s’adresse à tous les âges, la politique culturelle de l’Ondif met un accent particulier sur les jeunes avec beaucoup d’actions participatives dont la directrice générale de l’Ondif salue « les vertus formidables en termes de connexion à l’autre, d’écoute de soi-même, d’épanouissement, avec la discipline dans le travail qu’elles supposent ». Des entreprises pour lesquelles l’Ondif a fait appel à des compositeurs tels que Julien Le Herissier, Sylvain Griotto, Alexandre Levy ou Mélie Fraisse. Par ailleurs, depuis trois ans, à la demande de la Région Île-de-France, une action spécifique est menée en direction des lycéens avec « Tous à l’orchestre » ; des concerts-rencontres dans les établissements scolaires destinés à faire découvrir le répertoire et la vie du musicien d’orchestre. La musique chorale contribue aussi à établir le lien avec les lycéens : nouvelle initiative, « Tous en chœur » implique une quinzaine d’établissement sur l’ensemble des départements de l’Île-de-France. Les élèves qui y auront pris part se réuniront le 9 mai prochain, sous la direction de Case Scaglione, en compagnie de Patricia Petibon et la Maîtrise de Notre-Dame de Paris, sur la scène du théâtre des Champs-Elysées. Belle récompense !
Les tout-petits n’ont pas été oubliés et la Maison de l’Orchestre à Alfortville propose régulièrement des concerts spéciaux pour les 0-3 ans. «Des moments très beaux, car partagés avec les parents, note F. Voisin, mais qui comme toutes les actions culturelles de l’Orchestre ne peuvent se réaliser qu’avec des musiciens très impliqués dans l’action culturelle tels que ceux de l’Ondif ».
Côté spectacles « en famille », l’actualité du l’Ondif vient d’être marquée par trois représentations du Scarabée d’or, ouvrage inspiré d’Edgar Poe sur une musique de Dai Fujikura. Dirigé par Jean Deroyer, il est encore possible de le découvrir à la Cité de la musique le 8 avril.
Quant aux programmes symphoniques, une série (du 6 au 15 mars) permet de retrouver l’Orchestre, sous la baguette de l’Américain James Feddeck (vainqueur du Sir Georg Solti Conducting Award en 2013), dans des ouvrages de Prokofiev, Dvorak et Elgar (le Concerto pour violoncelle sous l’archet de Victor Julien-Laferrière). Case Scaglione sera quant à lui de retour (du 20 au 29 mars) pour un programme à forte dominante américaine – un répertoire que le chef est bien décidé à faire travailler à ses musiciens – comprenant la rare Symphonie n° 1 de Barber, le Concerto en fa de Gershwin (par Marie-Ange Nguci), A Different Drummer, ouvrage pour timbales et orchestre de Steven Mackey (né en 1956), et l’impérissable Mer de Debussy.
Alain Cochard
(Entretien avec Fabienne Voisin réalisé le 15 janvier 2020)
(1) 1 CD #NoMadMusic NMM069
(2) Pour en savoir plus sur le Studio :
www.orchestre-ile.com/studio/page/presentation
Site de l’Orchestre national d’Île-de-France : www.orchestre-ile.com/
8ème Concours Île de créations :
www.orchestre-ile.com/page/ile-de-creations
www.cdbm.org/spectacles/musique/8e-edition-du-concours-ile-de.html
Photo © Christophe Urbain
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