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Rennes - Compte-rendu - Charme suranné


Il y a du Guitry dans l’air ! Tandis Grand Théâtre de Tours s’apprête à donner Mozart (du 23 au 25 janvier) et l’Auditorium du Musée d’Orsay L’Amour masqué (du 3 au 8 février), l’Opéra de Rennes a mis à l’affiche pour la période des fêtes Ô mon bel inconnu, une « comédie musicale » fruit de la collaboration de Sacha le magnifique et de Reynaldo Hahn. Un nouvel exemple de la politique découvreuse de l’institution bretonne.

« Comédie musicale » ? Le libellé prête à confusion car la partie théâtrale occupe l’essentiel d’une oeuvre ponctuée de quelques épisodes musicaux de l’auteur de Ciboulette. Si tout le monde à en mémoire le fameux duo « Qu’est-ce qu’il faut pour être heureux » et d’autres airs fameux, il n’est pas souvent donné d’entendre l’ouvrage dans son intégralité. « Pas le moment de dépenser de l’argent à des bêtises ; l’Etat fait des économies prenons modèle sur lui. » : Ô mon bel inconnu fait directement référence à la période de crise durant laquelle il fut créé (1933), mais hormis ce rapprochement, son argument paraît bien daté à l’époque d’internet, de Meetic, et du speed dating et, surtout, dans d’autres contextes Guitry s’est montré plus brillant, virtuose et féroce qu’ici.

On n’a pas pour autant regretté la découverte d’un spectacle un peu trop sagement mis en scène par Jean-Michel Fournereau (par ailleurs interprète des rôles de Xavier et Victor) dans des décors d’Eric Chevalier et des costumes de Frédéric Linares. J.M. Fournereau aurait dû imprimer plus de rythme à l’Acte 1, mais son travail se révèle plus convaincant dans les deux actes suivants. D’autant que l’équipe réunie pour cette coproduction avec l’Opéra-Théâtre de Metz s’acquitte avec talent et conviction de sa tâche, du couple bourgeois formé par Jean-Baptiste Dumora et Edwige Bourdy jusqu’à la gouailleuse Lara Neumann dans le rôle de la Félicie, leur bonne – qu’une certaine Arletty incarna lors de la création aux Bouffes-Parisiens en octobre 1933 – en passant par le Lallumette d’Olivier Hernandez, muet mais point silencieux.

A la tête de l’Orchestre de Bretagne, le chef belge Jean-Pierre Haeck distille la musique de Reynaldo Hahn avec une finesse et un goût qui ajoutent au charme suranné de la soirée.

Alain Cochard

Sacha Guitry/Reynaldo Hahn : Ô mon bel inconnu. Opéra de Rennes, le 29 décembre 2008. Avec Jean Baptiste Dumora (Aubertin), Edwige Bourdy(Antoinette), Marianne Lambert (Marie-Anne), Lara Neumann(Félicie), Olivier Hernandez (Lallumette), Virgile Frannais (Aviland), Valery Rodriguez (Jean-Paul), Jean-Michel Fournereau (Xavier/Victor).

Photo : DR

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