Créée en 1987 par l’Anglais Robert Weddle, la maîtrise de Caen est dirigée depuis 2003 par Olivier Opdebeeck (photo), assisté de Priscilia Valdazo. Elle est composée de garçons scolarisés dans des classes à horaires aménagés du CE1 à la 3e. Ce cursus est le fruit d’un partenariat entre l’Education Nationale, le conservatoire à rayonnement régional de Caen et le théâtre de Caen. Les pupitres de ténor et de basse étant tenus par des chanteurs professionnels.
Le 18 juin, la maîtrise a donné la vingtième et dernière audition de la saison, en interprétant les Chichester Psalms de Leonard Bernstein.
L’occasion pour Concertclassic de rencontrer Olivier Opdebeeck, le directeur musical de cette formation atypique, dont la renommée va au-delà des frontières de la Normandie.
 
Quel bilan tirez vous de cette saison ?
 
Le bilan est excellent. Malgré une période encore marquée par des contraintes sanitaires, on a pratiquement fait l’intégralité de ce qui était prévu et on a pu donner au théâtre de Caen L’arche de Noé de Benjamin Britten (1), une grande aventure dont je rêvais depuis dix ans. Les 20 auditions (chaque concert est gratuit et dure 30 minutes ndlr) programmées à l’église Notre-Dame de la Gloriette, ont eu lieu avec des effectifs différents suivant les œuvres. Pour respecter les jauges, on a éclaté la maîtrise en trois groupes. En fait, je ne me suis pas posé trop de questions et j’ai respecté les contraintes. Quand il a fallu chanter masqué, on a chanté masqué ; quand on nous a imposé plus d’espace entre chaque chanteur, on a respecté cette règle et paradoxalement cette situation a engendré un certain nombre d’avantages. Ainsi, on a constaté qu’en étant moins serrés sur les estrades, les enfants étaient obligés de mieux s’écouter et ça a donné plus d’amplitude, d’ampleur au son. Grâce au théâtre de Caen, on a acheté des estrades qui ont permis d’avoir une nouvelle disposition. Enfin, on a fait intervenir le professeur de technique vocale sur certaines répétitions pour mieux s’éclater en différents groupes.
 

© Thierry Geffrotin
 
 Quel bilan établissez vous, à titre personnel, au terme de presque deux décennies comme directeur musical de la maîtrise de Caen?
 
 C’était le grand projet de ma vie. Je n’ai jamais passé vingt ans dans une institution et avec la maîtrise, je n’ai pas eu besoin de me forcer. C’est toujours renouvelé. J’ai voulu garder la structure mise en place à l’origine par Robert Weddle qui est bonne et saine et on a fait des vraies modifications de consolidations musicales. Par exemple, le poste d’assistant qui était très aléatoire est devenu un véritable emploi, bien rémunéré. Les cours de technique vocales sont passés de 12 à 20 heures. On a fait en sorte que la maîtrise passe les années, tout en gardant une qualité constante. Et je dois dire qu’à chaque audition, l’église est pleine, qu’on chante du Bach, du Josquin Desprez ou du Philippe Hersant. Le public nous suit et les enfants aiment chanter tous les styles de musique, pourvu qu’elle soit bonne.
 
Diriger un groupe qui par nature se renouvelle, n’est-ce pas frustrant ?
 
Il y a quelques années j’avais écrit pour Diapason un article sur les maîtrises et, avec le rédacteur en chef, on avait trouvé comme titre : les éphémères. Les voix d’enfants c’est exactement ça et je pourrais en proposer un autre qui serait les funambules. Les enfants arrivent à faire des choses d’une difficulté insensé et on sait que ça ne va pas durer très longtemps. Dans un sens, c’est frustrant et d’un autre côté, c’est aussi ça qui génère les émotions. Une voix d’enfant apprend à goûter l’instant présent. On a entendu Hadrien Joubert qui chantait les solos des Chichester Psalms. Je sais que dans un an, il aura probablement mué. L’émotion qu’on en retire est d’autant plus forte.
 
Propos recueillis par Thierry Geffrotin le 20 juin 2022
 

 
(1) www.concertclassic.com/article/larche-de-noe-de-benjamin-britten-au-theatre-de-caen-un-deluge-de-talents-compte-rendu
 
La saison 2022/23 sera prochainement en ligne sur le site de la Maîtrise de Caen : theatre.caen.fr/la-maitrise-de-caen
 
 
Photo © T. Geffrotin