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55e Concours de Jeunes Chefs d’Orchestre de Besançon – Une passionnante finale – Compte-rendu
270 dossiers de candidature : les responsables de la sélection des candidats aux 55e Concours de Jeunes Chefs d’Orchestre de Besançon n’ont pas chômé ! Des épreuves de présélection (confiées à deux chefs, l’Argentin Jorge Rotter et la britannique Catherine Larsen-Maguire) se sont tenues à Berlin, Besançon, Montréal et Pékin afin de déterminer la liste des vingt musiciens autorisés à se présenter sur la ligne départ, le 11 septembre. Présidé par Leonard Slatkin, le jury, qui réunissait Philippe Hersant (compositeur en résidence au Festival de Besançon depuis 2016 et auteur de la pièce contemporaine de la finale), Stefan Asbury, Valérie Chevalier, Catherine Larsen-Maguire, Jorge Rotter et Jean-François Verdier (directeur musical de l’Orchestre Victor Hugo Franche-Comté), a retenu trois noms pour finale.
Leonard Slatkin, président du jury © DR
Trois comme le prévoit la règlement certes, mais surtout trois jeunes musiciens de haut niveau qui ont su rendre l’ultime épreuve de bout en bout passionnante, ce d’autant que le programme, exigeant, permettait vraiment de juger des aptitudes de chacun : Le jardin étoilé de Philippe Hersant (pièce d’une douzaine de minutes, inspirée d’un poème Georg Trakl, donnée en création mondiale), Nuages & Fêtes (ext. des Nocturnes de Debussy) et, dans un tout autre esprit, l’ouverture de la Chauve-Souris de Johann Strauss, le tout confié à l’Orchestre National de Lyon, aussi remarquable de santé et d’engagement que de fidélité aux exigences respectives des trois finalistes.
Ben Glassberg © Petit
Carton plein pour le britannique Benn Glassberg (photo), qui remporte le Grand Prix tant convoité, mais aussi le « Coup de cœur du public » et celui de l’Orchestre. Diplômé de Cambridge, l’ancien élève de Sian Edwards à la Royal Academy of Music, il peut déjà se prévaloir d’une très solide expérience, dans le domaine lyrique en particulier (l’an passé, il était l’assistant d’Antonello Manacorda sur la production de Béatrice et Bénédict à Glyndebourne). 23 ans seulement... Dès l’attaque de la belle pièce de Philippe Hersant qui ouvre le programme, on est saisi tant par l’assurance de B. Glassberg, que par un « bras » capable d’imposer d’emblée une couleur particulière, résolument personnelle, plus sombre que celle de deux autres concurrents. La densité et la vie intérieure de son Jardin étoilé émerveillent et l’on n’est pas moins séduit par le mystère et le sens du détail (l’attention aux harpes dans Fêtes) de son Debussy. Quant à Strauss, la souplesse et le nerf, le charme et l’esprit avec lesquels Glassberg l’aborde disent à quel formidable chef lyrique on a affaire. Il a déjà des engagements au théâtre An der Wien, ce qui n’est pas pour étonner. Un musicien d’une maturité impressionnante dont on n’a pas fini d’entendre parler !
Jordan Gudefin © Petit
Un unique Grand Prix est attribué à Besançon mais trois vraies personnalités, bien affirmées, se confrontent lors de la finale de ce 55e Concours. Elle aura été l’occasion pour nous de découvrir le chef français Jordan Gudefin (28 ans). Percussionniste à l’origine, il a travaillé la direction au CNSMD de Paris auprès d’Alain Altinoglu. Dès lors, on comprend mieux l’esthétique du jeune artiste : Gudefin est un éveilleur de timbres. D’une battue souple et ample, le regard en éveil, il entretient une relation naturelle et complice avec ses musiciens. Sans doute a-t-il mis un brin trop de lumière dans le Jardin étoilé. On a en tout cas été séduit par son onirisme, son aptitude à faire vivre le tissu orchestral, sa manière de conduire la phrase à son terme, là comme dans des Debussy finement distillés. Et si son ouverture de la Chauve-Souris manque d’un peu de mordant, le chic ne lui fait pas défaut.
Ivan Demidov © Petit
Formé à Saint-Pétersbourg, d’abord au Collège Rimski-Korsakov, puis au Conservatoire dans la classe d’Alexandre Dmitriev, Ivan Demidov ne peut renier l’école dont il issu. Des activités à l’Opéra de Chambre de Saint-Pétersbourg (en 2014/2015), avec l’Orchestre du Conservatoire de Saint-Pétersbourg ont contribué à fortifier son métier – il sera chef et répétiteur au théâtre d’Augsburg la saison prochaine. 26 ans et sacré meneur d’hommes ! Si la direction du Russe souffre d’un relatif manque d’échange visuel avec l’orchestre, si le traitement des fins de phrases est souvent trop tranchant, les « coutures » des œuvres un peu trop visibles par endroits, l’autorité avec lequel ce jeune homme au charisme indéniable mène ses troupes force le respect.
Un Grand Prix à Ben Glassberg, pleinement justifié, au 55e Concours de Besançon, mais trois jeunes chefs à suivre attentivement, on l’aura compris.
Alain Cochard
Besançon, Théâtre Ledoux, 17 septembre 2017
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