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« In Between - Narcisse » par l’Ensemble Intercontemporain à la Cité de la musique – Créations et floraisons – Compte-rendu
Pour lancer sa saison, l’Ensemble Intercontemporain offre non moins de trois créations mondiales. Complété d’une reprise et d’une œuvre clef de la musique d’aujourd’hui, c’est donc un florissant panorama pour ce concert d’ouverture. Le tout, présenté dans une mise en espace et une dispersion des intervenants suivant les pages interprétées et leurs effectifs changeants, à différents emplacements de la salle de la Cité de musique.
Le parterre est ainsi divisé par un plateau central et deux plateaux de part et d’autre en fonds avant et arrière, avec le public réparti tout autour. La mise en espace due à Aliénor Dauchez et Michael Kleine, s’insère dans cette installation à l’appui de quelques miroirs et autres éléments de décorum suspendus, avec costumes bariolés façon sortie de bain pour tous. Divertissant ! Des traits de lumières, des mouvements et des textes déclamés entendent illustrer le thème « In Between - Narcisse » en intitulé du concert. La figure mythologique de Narcisse et son reflet restent toutefois en retrait d’une animation quelque peu diffuse, voire superfétatoire, mais se retrouvent comme fil conducteur des œuvres interprétées.
© Quentin Chevrier
Première de celles-ci, Kaleidoscopic Memories de Beat Furrer (né en 1954) reprend une page créée en 2016 dans le cadre du Festival ManiFeste, pour soliste contrebassiste et électronique. Une espèce d’envol, à la charge d’un Nicolas Crosse virtuose, dans une texture bigarrée propice à un début de soirée sur le
plateau en front de salle. S’ensuit R.FL.TS D.NS L’, commande de l’Intercontemporain à Yves Chaurris (né en 1980) en création, pour piano et ensemble sur le plateau central, qui s’inspire et rend hommage aux Reflets dans l’eau de Debussy, comme l’indique son titre elliptique). Bien davantage qu’une simple orchestration, l’œuvre distille des sonorités diaphanes conjuguant un piano démultiplié, Steinway et historique Érard (sous les doigts de Sébastien Vichard), en sus de deux autres pianos droits face à face sur les hauteurs de balcons, entre deux ensembles instrumentaux eux aussi en miroir. Une réelle séduction.
Autre commande et création ensuite : (É)craN/Narcisse (et autre titre alambiqué !) de Brice Pauset (1965), pour récitant, ensemble spatialisé en six groupes et électronique, fait un complet contraste, avec ses timbres imposants, comme clamés dans sa structure complexe, entrecoupés de pauses récitées à partir de textes littéraires évocateurs du mythe de Narcisse par Pauset lui-même.
Après l’entracte, place à Dialogue de l’ombre double, fameuse pièce de Pierre Boulez pour clarinette et son contrepoint enregistré et remixé. Retour d’un classique, daté de 1985, et une manière de référence diffusée ardemment par Jérôme Comte. Puis, dernière œuvre et dernière création, Doppelgänger (« double » ou « sosie » en allemand), Concerto n°1 pour trompette(s) et ensemble de Yann Robin (1974), achève la soirée, cette fois sur le plateau sis en fond de salle. Une œuvre percussive mêlée de rappels quasi répétitifs, bien emportée (en particulier par la trompette solo de Clément Saunier) pour conclure avec faste le concert.
Dans les trois pages où officie l’Intercontemporain en large formation, avec justesse et précision d’une œuvre à l’autre tant différentes, Matthias Pintscher règle détails et ensembles avec l’attention subtile ou ferme qu’on connaît à sa direction. Alexis Baskind et Andrew Gerzso se chargent d’une réalisation informatique musicale Ircam des mieux appropriées. Un prometteur début de saison pour l’Intercontemporain.
Pierre-René Serna
Paris, Salle de la Cité de la Musique, 25 septembre 2021.
Photo © EIC
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