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Compte-rendu - Arcadi Volodos – Prodigieux poète
De quelle planète vient ce pianiste, se demande-t-on en entendant Arcadi Volodos attaquer son récital et conduire avec une aisance déconcertante et une impalpable poésie l’Etude op 42 n°3 de Scriabine – on aura bien d’autres occasions par la suite de goûter à l’extraordinaire art du trille de l’artiste ! Prélude op 37 n°1, Prélude op 11 n°16, Danse languide, Flammes sombres, Guirlandes : d’une parfaite logique, l’enchaînement de pièces brèves du maître Russe conduit avec autant d’imagination sonore que de sens des caractères à la rare Sonate n°7 « Messe blanche » dont Volodos saisit l’atmosphère si particulière avec un mélange de jubilation, de volupté et d’envoûtant mystère qui se nourrit en particulier d’une palette de timbres et de dynamiques invraisemblablement nuancée.
Passer directement de Scriabine au Ravel des Valses nobles et sentimentales peut surprendre, mais ne pose aucun problème lorsque l’on approche l’ouvrage de cette manière. Oubliés l’acidité, les angles vifs, le côté « inconfortable » de pas mal d’interprétations : sous les doigts d’un pur magicien de sons, l’œuvre s’écoule avec une fluidité déconcertante et une alliance de poésie et de mystère – sans doute le mot qui vient le plus immédiatement à l’esprit au sortir de ce récital- que l’on n’a tout simplement jamais entendues dans cette œuvre.
On n’associait pas jusqu’ici Arcadi Volodos à la musique espagnole. Les choses pourraient bien changer tant le pianisme et les couleurs de l’interprète lui conviennent. D’Albeniz, il signe d’abord un Cordoba empli des parfums et des chants de la nuit, puis une Vega d’une entêtante beauté où son piano « donne à voir » et dessine un fabuleux espace poétique. Hypnotique !
Liszt est en revanche un compositeur où l’on a souvent entendu Volodos, mais le Après une lecture du Dante placé en fin de programme donne la mesure de l’évolution d’un artiste que certains persistent à associer aux coruscantes transcriptions et pièces de virtuosité qu’il affectionnait à ses débuts. Ce Volodos-là n’existe tout simplement plus. Sa technique transcendante, au lisztien du terme, lui a permis d’atteindre les plus hautes cimes. Volodos est un phénomène unique dans le piano contemporain : prodigieux virtuose, mais surtout prodigieux poète dont l’art fascine jusqu’au vertige.
Alain Cochard
Paris, Théâtre des Champs-Elysées, le 29 avril 2009
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Photo : DR
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