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Compte-rendu : Michel Tabachnik et le Philharmonique de Bruxelles - Liszt, si ; Nono, no !
Michel Tabachnik et son Philharmonique de Bruxelles ont désormais leurs habitudes à la Cité de la musique qui vient de les inviter à participer à sa série « Les utopies » en conjuguant dans un cycle la modernité de Franz Liszt et de Luigi Nono. A l’issue de la soirée, le plus moderne n’était pas celui qu’on pense ; en tout cas, aux oreilles du public de ce temple de l’avant-garde. En ouverture, Mazeppa a filé à un train d’enfer digne d’une chevauchée hollywoodienne.
Le Concerto pour piano n°1 de Liszt fut magnifiquement dompté par l’orchestre et le jeune pur sang Jean Frédéric Neuburger au clavier : jolie conjugaison de maîtrise et de fougue. La salle eut bien raison de ne pas le laisser partir en si bon chemin : avec infiniment d’à propos, il choisit en bis et en guise de transition avec les pièces de Nono, la Bagatelle sans tonalité… Mais il aurait pu jouer l’autre pièce de Liszt annonciatrice d’avenir la Lugubre gondole qui nous aurait menés jusqu’à l’île de la Giudecca où Nono, gendre de Schoenberg, vivait au milieu du petit peuple des pêcheurs.
C’est un témoignage de son engagement soixante-huitard, le Musica Manifesto n°2 ; non consumiamo Marx, pour bande magnétique seule, ressemblant davantage à des extraits sonores de manifestations politiques qu’à de la musique proprement dite, qui ouvrit cette seconde partie. Mais le public se chargea de fermer promptement le banc en manifestant bruyamment sa désapprobation : un comble dans le temple de la modernité voulu par Boulez ! Lourde leçon aussi qui prouve que l’enfer est bien pavé de bonnes intentions…utopiques. Du moins, Michel Tabachnik et ses musiciens n’étaient-ils pour rien dans ce désamour.
Ils revinrent conclure la soirée avec la première œuvre, l’opus 1 de Nono, ses Variations canoniques sur la série de l’opus 41 de son beau-père Arnold Schoenberg. Loin du scandale provoqué par la création de l’œuvre à Darmstadt en 1950, ce premier essai un peu longuet ne suscita qu’applaudissements polis - pour les interprètes - preuve que décidément l’inventeur d’avenir n’est sans doute pas celui des deux qu’on croit…
Jacques Doucelin.
Paris, Cité de la musique, 11 mars 2011
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