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Orléans - Compte-rendu : Le souffle Latchoumia
En peu de temps le Concours de Piano XXe siècle d’Orléans a su se tailler une belle place dans la liste des compétitions internationales. Ce résultat doit beaucoup à la volonté de Françoise Thinat, fondatrice du Concours, et à la clairvoyance de jurys qui se sont attachés à couronner de véritables personnalités (Toros Can, Winston Choi, Francesco Tristano Schlimé, Wilhem Latchoumia (photo)) plutôt que de consensuelles « bêtes de concours ». L’attention que les mélomanes portent désormais aux découvertes du Concours d’Orléans tient aussi à la fidélité et au « suivi » dont celui-ci fait bénéficier les artistes. Biennal, il profite ainsi des années « creuses » pour leur organiser divers concerts. Quelques semaines après une soirée partagée entre plusieurs interprètes à la salle Cortot en mars, Orléans accueillait un concert accompagné par l’Orchestre National de Lille sous la baguette de Jean Deroyer.
Après Requies, hommage de Berio à son épouse Cathy Berberian, décédée en 1983, dont le jeune chef français a su mettre en valeur la tendresse douloureuse, Prodromos Symeonidis, 2ème Prix du Concours 2006, prend place au clavier pour le Concerto n°3 de Prokofiev. Son interprétation confirme nos impressions de l’an passé. Digitalement fiable, le pianiste grec demeure trop monochrome et ne dialogue guère avec l’orchestre dans une partition qui tend pourtant bien des perches au soliste. Bilan de demi-teinte donc.
Qu’importe, si l’on y réfléchit bien : le Concours 2006 a été capable de révéler un artiste de grande classe : Wilhem Latchoumia – c’est déjà énorme !
Premier Prix 2006, le pianiste lyonnais, a le privilège d’interpréter la création française du Concerto pour piano de la Coréenne Unsuk Chin. Une partition touffue, surabondante mais que l’artiste défend avec engagement, gourmandise et une palette de timbres très large. « Cette composition reflète les influences de chaque époque de la littérature pianistique de Scarlatti à aujourd’hui, explique l’auteur. Je voulais mettre en évidence les multiples aspects du piano, tout particulièrement la vitalité, l’énergie, la virtuosité, en un mot son caractère enjoué. »
Message reçu 5 sur 5 par un pianiste qui signe une interprétation vivante et ludique aux côtés d’un orchestre complice, mené avec sobriété et précision par Jean Deroyer. Après ce foisonnement de couleurs venue d’Asie, le pianiste lance deux clins d’œil à l’Amérique latine au moment des bis avec O Polichinelo de la 1ère Suite du A Prole do Bebê de Villa-Lobos – une musique qui lui va comme un gant ! – et le tendre et sensuel Bailecito de Guastavino. On ne résiste pas au souffle du charismatique Latchoumia. A sa poésie non plus !
Alain Cochard
Orléans, Carré Saint-Vincent, 12 avril 2007
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