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Paris - Compte-rendu : Diana Damrau, étincelante et poète
Auréolée de succès après de nombreuses prestations à Vienne, Salzbourg, Milan ou NewYork, un récent album chez Virgin et une grande tournée franco-allemande, Diana Damrau donnait son premier récital à Paris, dans le cadre de la série Grandes Voix du TCE - rappelons qu’elle avait débuté au mois de septembre sur cette même scène, dans le rôle de Susanna, à l’occasion d’une version de concert des Noces de Figaro sous la baguette de Jérémie Rhorer.
Soprano colorature au registre pur et étoffé, cette jeune artiste allemande ne se limite pas, comme on pourrait le croire, à la bravoure où sa technique aguerrie et son aigu radieux sont exaltés, car sa Reine de la Nuit et sa Zerbinetta, fêtées un peu partout, côtoient depuis longtemps Gilda, Susanna, Leila ou Rosina. Forte de ces emplois lyriques, lyriques légers et de la confrontation de ces styles, la cantatrice se distingue par la fraîcheur de son timbre aux reflets irisés, son appréciable étendue, la souplesse de son instrument et une extrême agilité. En écho à son programme d’"Arie di bravura", enregistré avec Jérémie Rhorer et Le Cercle de l'Harmonie, l’artiste a conçu un programme Mozart/Salieri accompagné par Joseph Swensen à la tête de l'Ensemble Orchestral de Paris.
Après un air tiré de Cublai, gran Khan dei Tartari, composé par Salieri en 1788, sans grand intérêt (pauvreté mélodique et virtuosité scolaire), Diana Damrau s'est vite imposée en investissant pleinement le "Ach ich fühl's" de Pamina (Die Zauberflöte), pris dans un tempo délicatement retenu, déclamé avec une touchante vulnérabilité, des accents étreignants et une longueur de souffle d'une grande beauté. Plus ébouriffant que le premier, l'air "Fra i barbari sospetti" d'Alzima (Cublai) a permis à la cantatrice de faire assaut d'une belle virtuosité, appuyée sur un medium corsé et une ligne de chant épanouie à la dynamique ferme.
Débutée avec un morceau à vocalises tiré de la Semiramide de Salieri (1782), interprété avec l'aplomb et la hauteur nécessaires, la seconde partie restera dans les mémoires, le chef ayant décidé d'interrompre le grand air de Susanna en l'absence du basson, mystérieusement resté en coulisse.
Après un retentissant éclat de rire, Diana Damrau, professionnelle jusqu'au bout des ongles, a accepté de recommencer "from the beginning" le récitatif et l'air du 4ème acte des Noces de Figaro, retrouvant sans difficulté le ton, l'atmosphère "en apesanteur" et la pureté que demande cette pièce magique, éclairée par des rayons de lune. Le grand air de Giunia issu de Lucio Silla "Parto m'affretto" concluait sur une note on ne peut plus favorable ce concert, la jeune femme traduisant parfaitement l'état d'exaltation de l'héroïne (rythmes syncopés, sauts d'octaves, vocalises interminables), aidée par le génie mozartien qui associe vélocité et drame, dans un même discours.
Un tonnerre d'applaudissements accueillit sans surprise cet étincelant numéro immédiatement prolongé par un premier rappel, un air de La finta scema de Salieri, "Se piegar potessi appieno", au phrasé noble et à la pyrotechnie conquérante, suivi par le magnifique "Alleluia" de l’Exsultate, jubilate de Mozart, à l'alacrité triomphante et au cantabile irréprochable, puis de la reprise du "Sento l'amica speme" de Semiramide, d'une réjouissante autorité vocale. Saluons au passage le beau soutien musical obtenu par Joseph Swensen de l'EOP, dont les instrumentistes ont également joué avec élégance et implication Mozart (Divertimento K136, les ouvertures de Cosi fan tutte, Don Giovanni, Les Noces de Figaro et de Lucio Silla) ainsi que Gluck (Orphée et Eurydice).
Il ne reste plus aux Parisiens qui désireraient retrouver la jeune artiste en scène de patienter sagement, car Diana Damrau n'est malheureusement annoncée dans aucun théâtre de la capitale.
François Lesueur
Théâtre des Champs-Elysées, 18 mars 2008
Programme détaillé du Théâtre des Champs-Elysées
Photo : DR
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