Le Festival d’Automne conviait au Châtelet l’Orchestre symphonique du SWR Baden-Baden & Freiburg sous la direction du chef japonais Kazushi Ono autour d’une thématique faisant la part belle à différents avatars du souffle. The Compass (2005) de l’Australienne Liza Lim fait référence aux grands espaces et intègre un instrument traditionnel des aborigènes (le didgeridoo) et une flûte dans un ensemble orchestral planant qui aurait gagné à la concision quelle que soit la qualité des solistes (William Barton impressionnant au didgeridoo et Gunhild Ott très en verve à la flûte).

En revanche …miramondo multiplo pour trompette et orchestre de l’Autrichienne Olga Neuwirth, créé au Festival de Salzbourg en 2006 par l’Orchestre Philharmonique de Vienne sous la direction de Pierre Boulez, est une partition d’une densité virtuose où le trompettiste suédois Häkan Hardenberger réalise des prouesses techniques au sein d’un kaléidoscope de formes et de couleurs qui symbolise avec un sens rythmique et mélodique très élaboré la place de l’individu face à la collectivité.

À la tête d’un orchestre d’une efficacité et d’une homogénéité remarquables, Kazushi Ono manifeste une précision alliée à un sens aigu de la phrase musicale qui se retrouvent dans la Sixième Symphonie de Prokofiev exécutée après l’entracte. Plutôt que de souligner le désespoir qui sourd de l’ouvrage (on est à la fin de la Seconde Guerre mondiale et les persécutions du réalisme socialiste se profilent), l’interprétation tranchante mais aux couleurs sans cesse changeantes suscite, jusqu’à la joie feinte du triomphe final, une sensation de concentration implacable contrastant avec l’extraversion de Gergiev il y a peu de temps salle Pleyel à la tête du LSO. Ce travail d’orfèvre laisse bien augurer de l’arrivée du chef japonais à la tête de l’Orchestre de l’Opéra de Lyon.

Michel Le Naour

Théâtre du Châtelet, 6 novembre 2008

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Photo : DR