Journal
Patrick Davin, Nicholas Angelich et l’Orchestre du Conservatoire – Festin français
Bandar-log de Koechlin, Concerto pour la main gauche de Ravel, 1ère Symphonie « Le Poème de la forêt » de Roussel : équilibré entre le rare et le célèbre, le programme dirigé par Patrick Davin à la Cité de la musique aura fait la joie de tous. Des mélomanes épris de musique française, comme des jeunes instrumentistes de l’Orchestre du Conservatoire de Paris car – c’est aussi le but d’un concert avec une formation de ce type – il y a, passez-moi l’expression, du boulot pour tout le monde à tous étages dans de telles partitions. A commencer par l’Opus 176 de Koechlin, volet conclusif du Livre de la Jungle, où l'on découvre les musiciens s’ébrouant avec vitalité et humour. Belle entrée en matière pour un concert que prolonge un sommet absolu de littérature concertante confié à la sénestre d’un des plus grands pianistes français d’aujourd’hui, Nicholas Angelich.
Sacré chance pour les membres de l’Orchestre du Conservatoire que de pouvoir nouer le dialogue avec un artiste de ce calibre ; car telle bien est l’option choisie par celui qui rejette toute esbroufe pour mieux sculpter le son, nuancer les ombres du noir chef-d’œuvre et entrer en osmose avec la phalange (chapeau au basson solo pour son intervention !) et un chef attentif. L’enthousiasme légitime du public nous vaut, en bis, le 2ème mouvement de la Sonatine du même Ravel. Un poète parle…
On enrage de ne pas entendre plus souvent la musique de Roussel au concert, sa 1ère Symphonie par exemple, ce plus encore après une exécution qui magnifie la sensibilité et l’imagination sonore d’un de nos grands symphonistes. Le compositeur montre ici une dette envers ses prédécesseurs (Debussy, D’Indy) ? Sans doute, mais l’intelligence de Patrick Davin est ne pas se cantonner à la mise en valeur de cet aspect. Dans des tempi plutôt allants, il préfère aviver les coloris, faire frissonner les détails – bien aidé en cela par les vents dont il dispose –, soigner la ligne (quelle sveltesse du trait dans Faunes et Dryades !) et, partant, montrer toutes les perspectives ouvertes par ce chef-d’œuvre de jeunesse. L’Orchestre du Conservatoire se prend au jeu : irrésistible !
Saluons enfin l’élégance d’un chef qui, au moment des saluts, se tient côté jardin ou côté cour afin que ses jeunes troupes savourent mieux encore un succès mérité.
Alain Cochard
Paris, Cité de la musique, 1er février 2014
Photo © Julien Pohl
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