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Saison musicale à Royaumont - A l'écoute de l'oratorio - Compte-rendu
Quand Royaumont ouvre sa saison, le mélomane sait que l'automne est proche. Avec cette année, une riche affiche aux couleurs des oratorios de Giacomo Carissimi, la grande figure musicale de la Rome du Seicento, et des histoires sacrées de son élève français Marc-Antoine Charpentier : un disciple digne du maître.
Confié à l'ensemble italien Il Canto di Orfeo, dirigé de son orgue par l'inventif Gianluca Capuano, le concert de l'après-midi, entièrement consacré au musicien du Collège Germanique, présentait un stimulant programme d'oratorios à double choeur.
Mais d'abord un heureux constat : en dépit de la dissolution de l'ordre des Jésuites en 1773, dissolution qui entraîna la dispersion de tous ses manuscrits, l'oeuvre de Carissimi se trouve aujourd'hui confortée par le fonds légué par Gian Marco Manusardi, considéré comme le plus complet au monde.
En tout cas, les lectures vibrantes du Dives Malus (la parabole du mauvais Riche) et de Jonas le prophète que la baleine rejeta pour qu'il aille prêcher la parole de Dieu aux Ninivites impies, renouvelaient très sensiblement le sujet (citons, chez les chanteurs, les sopranos de Francesca Cassinari et Paola Molinari et les basses de Mauro Borgioni et Salvo Vitale, entre autres).Cependant que les vertus rhétoriques du collectif faisaient merveille dans le grand choeur Et proeliebantur venti qui tournait au tableau d'effroi avec ses impressionnantes figurations donnant à voir la fureur des vents déchaînés dans Jonas.
A ces images dramatiques, livrées au pouvoir des mots, succédait un tout autre décor avec le concert du soir confié à l'Ensemble Correspondances, guidé par Sébastien Daucé (photo), également organiste et claveciniste.
C'est du côté des histoires sacrées de Marc-Antoine Charpentier que cette jeune et très talentueuse formation investigue. Un répertoire qui décline sa différence spirituelle dans la mouvance édifiante de la Contre-Réforme et à une époque où l'art tend à se standardiser, conséquence des directives de la cour louis-quatorzième (mémoire y est également faite des années d'apprentissage du musicien à Rome, quand ses modèles, outre Carissimi, s'appelaient Pasquini, Foggia, Giamberti et Melani).
Dans ce registre, Charpentier sait à merveille l'art de toucher le mélomane, un art que les fins virtuoses de Correspondances ont subtilement assimilé, sous la conduite de Sébastien Daucé, attentif à la ligne d'ensemble comme à l'affect qui fait symbole. Ainsi de l'histoire de Sainte Cécile,Vierge et Martyre H.397, la plus travaillée des quatre versions que l'auteur a écrites sur l'histoire de la sainte Romaine. On espère qu'un prochain DVD rendra justice aux très nombreuses beautés de la présente approche qui conjugue théâtralité et bonheur du chant loin de tout vedettariat, les rôles de Cécile et Valérien étant volontairement laissés dans l'anonymat sur le programme.
Roger Tellart
Abbbaye de Royaumont, 1er Septembre 2012
Saison musical de Royaumont, jusqu’au 14 octobre 2012 :
www.royaumont.com
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Photo : Agathe Poupeney
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