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Une interview de Philippe Fénelon

Commande de l’Opéra de Paris, Judith, monodrame d’après la tragédie de Friedrich Hebel, a amené Philippe Fénelon à se confronter une fois de plus à l’univers lyrique, l’un de ses domaines de prédilection. Quant à l’Orchestre de l’Opéra National de Paris, cette création est pour lui l’occasion d’un concert « hors les murs » à la salle Pleyel, le 29 novembre, sous la baguette de Cornelius Meister et avec la soprano Jeanne-Michèle Charbonnet.

Pourquoi avoir choisi le thème de Judith ?

Philippe Fénelon : La Judith de Hebel, n’est pas très connue en France et cette grande tragédie m’a intéressé car elle me permettait une lecture très personnelle. J’ai ainsi tiré d’un ouvrage en cinq actes, un monodrame, en cinq tableaux certes, mais pour un seul personnage alors que la pièce de Hebel comporte de nombreux rôles. J’aime la solitude de Judith, cette figure de femme puissante qui va aider son peuple à affronter le terrible Holopherne – il s’agit d’un personnage un peu différent de la Judith de la Bible.

Votre Judith est en allemand, langue que vous affectionnez particulièrement…

Philippe Fénelon : C’est en effet une langue musicale en soit. Son accentuation, son articulation collent parfaitement pour être mise en musique. Quand on la parle c’est presque comme si elle était chantée. Quelle chose formidable pour un compositeur que d’avoir affaire à un texte magnifique, dans une langue toujours intéressante à traiter de surcroît !

Qu’est-ce qui vous paraît faire la nouveauté de Judith dans votre parcours de compositeur lyrique ?

Philippe Fénelon : Il est difficile pour moi de répondre à cette question. La manière dont j’écris est toujours totalement adaptée à l’œuvre. Il s’agit en l’occurrence d’un monodrame d’une cinquantaine de minutes ; d’une pièce extrêmement dramatique et forte, avec un orchestre dense, intense et immense – l’effectif est le même que celui de Erwartung de Schönberg. La voix féminine qui chante pendant plus quarante minutes s’affronte à cette puissance orchestrale. J’ai cherché à montrer de grands espaces sonores et à mettre en exergue cette voix de femme au moyen d’un paysage sonore aussi puissant que possible.
Judith me donne l’occasion de retrouver Jeanne-Michèle Charbonnet, un soprano dramatique d’une très grande étendue, avec laquelle j’avais déjà travaillé à Bordeaux pour mon opéra Les Rois dans lequel elle chantait le rôle d’Ariane. J’aime beaucoup cette artiste, qui d’ailleurs est une grande Elektra à Berlin en ce moment. Jeanne-Michèle possède une voix d’une intensité dramatique très intéressante à traiter.

Quel sont vos projets lyriques ?

Philippe Fénelon : J’écris en ce moment un nouvel opéra pour le centenaire Tchékhov. La prise de risque est un peu différente car c’est la première fois que je travaille sur un livret en langue russe. Mais je ne suis pas trop dépaysé dans la mesure où j’ai autrefois étudié le bulgare aux Langues O. Par ailleurs je sais que Nicolas Joël reprendra mon Faust en février 2010 à l’Opéra de Paris.

Propos recueillis par Alain Cochard, le 29 octobre 2007

Concert « hors les murs » de L’Orchestre de l’Opéra National de Paris. Jeanne-Michèle Charbonnet, sop / dir. Cornelius Meister. Strauss : Ainsi Parlait Zarathoustra / Fénelon : Judith, monodrame en cinq tableaux (création mondiale)

Jeudi 29 novembre 2007 – 20h. Salle Pleyel

 

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