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Norma à l’Opéra Royal de Wallonie-Liège - Casta Patrizia – Compte-rendu

Comme elle a bien fait de prendre son temps, de patienter jusqu'à la cinquantaine, de mûrir rôle après rôle avant d’accepter en toute conscience cette Norma ! Certes Patrizia Ciofi (photo) n'a jamais choisi la facilité et ceux qui la connaissent l'ont toujours vu prendre des risques, aimant plus que tout se frotter à de nouvelles partitions qui l'ont conduite à se dépasser et à vaincre de nombreux obstacles : Maria Stuarda, La Straniera, Luisa Miller ou Zelmira, pour ne citer qu'elles, n'allaient pas de soi dans ce parcours débuté en tant que lirico, lirico-leggero et pourtant elle s'est mesurée avec succès à ces héroïnes aux formats vocaux de plus en plus dramatiques, tout en continuant à servir Mozart, Haendel, l'opéra français, Verdi et le bel canto qui ont permis à sa voix de conserver sa souplesse, sa texture et son extrême adaptabilité.
 
Sa Norma donnée à Liège pour la première fois, tient de la performance : la voix étoffée dans le medium semble avoir trouvé sa place avec naturel, ce qui lui permet d'investir le rôle des rôles aussi bien dans les récitatifs déclamés avec l'autorité et l'aura nécessaires, que dans les airs et les duos où son instrument se déploie sans contraintes. Derrière ce Bellini particulièrement redoutable, Ciofi, et c'est peut-être là que réside son secret, trouve de subtils prolongements entre la cantilène élégiaque qui soutient « Casta diva » et la poésie diaphane d'Amina (La Sonnambula), convoque le souvenir de la pure Giulietta (I Capuletti e i Montecchi) lors du suave « Oh rimembranza », ou l'intensité d'Alaide (La Straniera) dans les moments de fureur où Norma se révolte face à Pollione qui l'a trompée. Ainsi tout ce qui a fait le charme et la beauté de ses interprétations antérieures semble s'être déposé sur ses cordes et réapparaître comme par enchantement.

© Lorraine Wauters - Opéra Royal de Wallonie

Les passages attendus sont là, abordés sans la moindre esquive, cabalette, vocalises, grands aigus, jusqu'au fameux piano du « Son io », chaque intervention bénéficiant d'un fini belcantiste magnifique, signe révélateur d'une technique de haute école. Portée par son intuition et son extrême sensibilité, l'interprétation est bien sûr admirable, chaque facette de ce personnage complexe étant finement caractérisée (fierté de la Prêtresse, frémissement de la mère et fragilité de la femme abandonnée). Plus que son « Casta diva » argenté, son « Teneri figli » et son « Deh non volerli vittime » sommets d'émotion, resteront gravés dans nos mémoires. Cet Everest victorieusement gravi marque un tournant décisif dans la carrière de la cantatrice.

© Lorraine Wauter - Opéra Royal de Wallonie

Sans surprise Gregory Kunde – déjà aux côtés de Ciofi sur cette scène en 2014 dans Luisa Miller - est un phénoménal Pollione, d'une santé vocale étourdissante, mais également d'une justesse et d'un raffinement qui font de lui le meilleur titulaire de ce rôle ingrat. L'Adalgisa de Josè Maria Lo Monaco est une jolie découverte, la mezzo italienne proposant une approche finement ciselée du personnage qu'elle interprète d'une voix lumineuse et développée. Le bel Oroveso à la force tranquille d’Andrea Concetti ne passe pas inaperçu, comme l'ensemble des chœurs qui complètent cette distribution placée sous la direction très étudiée de Massimo Zanetti, dont on admire l'élégance du trait, la beauté des clairs-obscurs et le refus de tout pompiérisme, piège dans lequel tombent facilement certains chefs moins précautionneux.
 
La mise en scène de Davide Garattini Raimondi ne restera malheureusement pas dans les annales, ses choix esthétiques annihilant toutes les velléités de respecter l'époque du drame. A l'exception du bas-relief emprunté au Palazzo Altemps de Rome (Sarcofago Grande Ludovisi) qui occupe la partie basse du décor, la scénographie a tout du train fantôme éclairé comme à la fête foraine. Si les costumes de Norma sont plutôt réussis, le casque à pierreries et sequins qu’elle porte lui donne des airs de Gloria Swanson au temps du muet, ceux des autres protagonistes  sont ratés. Et que dire des perruques blondes dont sont parées les gauloises, comme de ces tristes chorégraphies qui accompagnent, sans aucune valeur ajoutée, de nombreuses scènes ne faisant que perturber la concentration des solistes.
 
François Lesueur

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Bellini : Norma – Liège, Opéra Royal de Wallonie, 28 octobre ; prochaines représentations le 31 octobre à Liège et le 4 novembre 2017 à Charleroi (Patrizia Ciofi remplacée par Silvia Dalla Benetta pour la dernière) // www.operaliege.be/fr/activites/norma
 
Photo © Lorraine Wauters – Opéra Royal de Wallonie

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