Journal
Savoie - Compte-rendu : Bonheur baroque aux Arcs
Mais d’abord, saluons la longévité – trente-cinq ans – du Festival-Académie des Arcs qui, au cœur des Alpes, offre aux interprètes un lieu magique pour assouvir une passion commune : celle de faire, en toute liberté, de la musique choisie ensemble.
Inspirée de l’exemple fameux des Rencontres de Marlboro aux Etats-Unis, la règle est également ici de transmettre cette passion fondatrice aux générations à venir. D’où tout un réseau de master-classes confiées à des intervenants émérites.
Dans ce laboratoire largement ouvert au grand répertoire (cette année, l’école scandinave est à l’honneur, avec Sibelius, Grieg et Berwald en chefs de file), comme à la création contemporaine (Laurent Martin, avocat de la micro-tonalité, est le compositeur invité), la musique ancienne n’est pas pour autant oubliée. Des ateliers d’initiation au style baroque y sont animés par les meilleurs spécialistes, telle la classe de clavecin confiée à Olivier Baumont, professeur au CNSM de Paris et, par ailleurs, l’une des valeurs sûres du concert international.
Disons que le don pédagogique, chez Baumont, est à la mesure du rare talent du concertiste. Témoin, les conseils éclairés – des « clés de lecture » en quelque sorte – qu’il prodiguait à la très jeune stagiaire Sibylle N…dans son approche du Prélude de la 2ème Suite anglaise pour clavecin de Bach. La liberté digitale y dicte certes sa conduite à l’interprète, mais toujours dans le droit-fil de la pensée créatrice du compositeur, nous faisant souvenir des recommandations de François Couperin : « l’exécution doit toujours seconder l’intention de l’auteur ».
Pareillement, côté interprètes, le même Olivier Baumont (photo) était au cœur du bel hommage rendu à l’école française du Grand-Siècle. Introduit par une guirlande d’airs de cour intimistes, revisités par le contre-ténor un brin formaliste de Robert Expert, le concert instrumental s’épanouissait pour le bonheur des amoureux du son baroque, regroupant autour du clavier de Baumont le violon de François Fernandez et la viole de gambe de Christine Plubeau qui respiraient la même joie de jouer et de vibrer à l’unisson. Après une superbe Sonate à Trois de Jean-Marie Leclair qui regardait sans équivoque vers le style italien (c’est toujours Couperin qui écrit : « le goût italien et le goût françois ont partagé depuis longtemps la République de la musique en France »), l’apothéose venait avec une vision captivante du Premier Concert des Pièces de Clavecin en Concert de Rameau. Vision touchée par les Muses et la grâce, comme dans le précieux tourbillon de La Vézinet où le babillage de nos chambristes tournait au divertissement de l’âme. Qu’ils en soient, au nom du très cher Jean-Philippe, chaleureusement remerciés !
Festival-Académie des Arcs, 25 juillet 2008
Roger Tellart
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Photo : DR
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