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Paris - Compte-rendu - Mariss Jansons exalte la foi naïve de Bruckner
Il y a les bons concerts, les concerts intéressants par leur programme ou leur soliste, et les concerts que c'est pas la peine, qu'on oublie sur le champ... Et puis, il y a ces soirées inoubliables parce qu'elles sont le fruit d'une rencontre exceptionnelle entre un chef, un orchestre, un compositeur et leur public. Ainsi du dernier concert donné au Théâtre des Champs-Elysées par les musiciens de la Radio bavaroise et leur patron Mariss Jansons à l'invitation des Productions Albert Sarfati.
D'abord un beau thème qui donne son unité à la soirée, intelligent et poétique, résumé dans le nom de la ville de Linz, capitale de la Haute Autriche que Mozart a gratifiée d'une de ses plus belles Symphonies et où Bruckner a passé une grande partie de sa vie de musicien. Du premier, Jansons avait choisi précisément la Symphonie Linz, pur jaillissement de l'exaltation créatrice d'un jeune maître de 28 ans, du second, la Symphonie n°4 dite « Romantique ». Jansons fait entendre, en effectif réduit, un Mozart classique, mais de haut style sans aucun débordement. Les seules limites seront celles du pupitre de violons qui n'ont pas la ductilité des cordes viennoises...
Pour la 4 è Symphonie de Bruckner, le choix s'est porté sur la version Nowak qui englobe tous les remords de l'organiste de Saint Florian. Plus d'une heure de musique que Mariss Jansons déploie comme un grand livre d'images, non point pieuses, mais naturalistes. D'entrée de jeu, le lointain appel de cor qui ouvre le premier mouvement sur un quadruple pianissimo des cordes saisit l'attention de l'auditeur et ne va plus la lâcher au fil des quatre mouvements qui constituent une manière de « ballade » au sens romantique du terme. Mais ce qu'on entend ici n'est pas brahmsien pour deux schillings !
Bien au contraire, le chef, décidément très inspiré, et son orchestre munichois à l'unisson vont faire entendre en lieu et place de la simple promenade dans les légendes de la forêt allemande une modernité dans les jeux de timbres qui annoncent les hardiesses d'un Mahler. Passent aussi les ombres bienveillantes de Schubert, Weber et Wagner. L'admiration de Bruckner pour ce dernier s'entend dans le fracas des grands débordements qui scandent cet itinéraire poétique. Tout est maîtrisé, réfléchi, mais nullement intellectuel : la foi naïve de Bruckner y trouve sa place. Toute sa place.
Jacques Doucelin
Théâtre des Champs-Elysées, 30 novembre.
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Photo : DR
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