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Compte-rendu : Droit dans le lac - La Donna del lago (2ème distribution) à Garnier
Composé par Rossini en 1819, La donna del lago se situe entre Ermione et Bianca e Falliero. Sans être ni la plus novatrice, ni la plus inspirée de ses partitions, elle offre au quatuor vocal convoqué (mezzo ou soprano/contralto/ténors), airs, duos et ensembles d'une très grande audace technique, la faiblesse résidant essentiellement dans son livret, librement adapté du poème éponyme de Walter Scott.
Paris n'avait jamais osé la monter sur scène jusqu'à Nicolas Joel, qui comble ainsi une absence aujourd'hui difficilement explicable. Malheureusement le spectacle de Lluis Pasqual est affligeant de lourdeur (ce décor écrasant que rien ne justifie), de facilités (ce faux choc entre costumes d'époque et tenues de soirées pour les choeurs), de futilités (ces trois danseurs qui brassent l'air autour des personnages), l'absence de direction d'acteur renforçant la vacuité de la réflexion et du dispositif. La musique pourtant subtile, délicate et raffinée ne trouve ainsi à aucun moment de prolongement scénique digne d'intérêt et laisse le spectateur dans le plus grand dénuement.
Le Rossini de Roberto Abbado souvent rude et peu porté sur la poésie, s'impose souvent aux forceps sans jamais révéler la gracieuse sensualité de l'écriture affichée par Riccardo Muti à la Scala (Philips - 1992) ; ainsi dirigés, les interprètes exécutent leurs "numéros" sans y croire, errant sur le plateau comme de vulgaires pantins. Karine Deshayes, qui succède à Joyce DiDonato, vocalise avec aisance, mais la tessiture hybride d'Elena, qui convenait si bien à la langoureuse Frederica von Stade (à Houston en 1981 et à Londres en 1985) ne lui va pas ; le timbre se cherche, la couleur élégiaque fait défaut, l'aigu est perçant et les écarts du "Tanti affetti" frôlent l'accident. Le chant brut et truqué de Daniela Barcellona (Malcom) peut faire illusion, mais ceux qui ont encore dans l'oreille l'insurpassable Marilyn Horne, ou l'impressionnante Ewa Podles (à Avignon en 2003 avec Rockwell Blake...) ne peuvent se contenter de cette exécution plate et sans risque, qui ne procure aucun frisson.
Bonne surprise en revanche du côté des Messieurs, les ténors Javier Camarena (Giacomo/Uberto) et Colin Lee (Rodrigo) ayant à coeur de s'engager vocalement et de livrer une très honorable leçon de bel canto, le premier avec le diabolique "Oh fiamma soave" à l'acte II, le second avec le vertigineux "Ma dov'è colei, che accende" au I, la basse Simon Orfila (Duglas) et le ténor Jason Bridges (Serano) faisant eux aussi bonne figure.
François Lesueur
Rossini : La donna del lago – Paris, Palais Garnier 5 juillet 2010
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Photo : DR
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