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Pour le XVIIe siècle français - Une interview de Sébastien Daucé, directeur musical de l’Ensemble Correspondances
Remarqué pour son récent CD « O Maria ! »(1), un séduisant programme de psaumes et motets de Marc-Antoine Charpentier, le jeune ensemble lyonnais Correspondances se produit bientôt à l’Abbaye Royale de Fontevraud (23/04) puis à l’Auditorium Ravel de Levallois-Perret (28/04). Deux occasions de découvrir en concert de jeunes chanteurs et instrumentistes qui affirment leur identité autour de la musique française sacrée du XVIIe siècle. Directeur musical de Correspondances, Sébastien Daucé répond à concertclassic.
Autour de quel projet l’Ensemble Correspondances est-il né ?
Sébastien DAUCE : L’Ensemble a démarré son activité en 2006, mais s’est vraiment structuré à partir de 2008. En 2009 nous avons effectué une tournée au Japon et notre premier CD a été enregistré l’an dernier. Correspondances est né autour du répertoire de musique française sacrée du XVIIe siècle, et en particulier de la figure emblématique de Marc-Antoine Charpentier. J’ai beaucoup travaillé sur cet auteur, certes connu car depuis trente ans nombreux sont ceux qui l’ont joué, mais qui reste encore à explorer, en particulier dans le domaine du petit motet. Il y a beaucoup à faire et le projet de Correspondances est d’y travailler avec une équipe très stable pendant plusieurs années. Nous avons toutefois aussi envie d’aborder l’œuvre de musiciens de la génération antérieure à Charpentier (ex. Moulinié, Boësset), des auteurs passionnants auxquels les interprètes se sont moins intéressés jusqu’à présent.
Boësset sera d’ailleurs au centre de notre prochain enregistrement. C’est un compositeur que l’on connaît un peu par des airs de cour, que le Poème Harmonique a enregistrés. On ne connaissait rien de sa musique sacré jusque récemment ; plusieurs musicologues (dont des Français du CMBV) sont parvenus à la conclusion qu’une bonne part d’un très gros manuscrit de musique sacrée en grande partie anonyme des années 1640-1660 (le Manuscrit Deslauriers) serait de la plume d’Antoine Boësset. Des pages qui auraient été écrites pour le couvent de Montmartre.
Comment avez-vous conçu le programme de votre CD « O Maria ! », composé de psaumes et motets de Charpentier ? Des compositions que l’on pourra d’ailleurs entendre le 23 avril lors de votre concert à l’Abbaye Royale de Fontevraud.
S.D. : Nous avons baignés pendant de longs mois dans la musique de Charpentier, nous avons lu énormément du musique. A moment de préparer l’enregistrement, notre choix s’est porté sur les œuvres qui nous touchaient le plus et nous sommes arrivés à une sélection de motets, tous plus ou moins unifiés stylistiquement car ils sont nés autour de 1680 et parcourus par la figure mariale.
Charpentier fait entendre une musique très sensuelle et intériorisée, d’une grande densité harmonique. Il s’oppose à l’univers beaucoup plus démonstratif, parfois un peu « tape-à-l’œil » de Lully.
L’Ensemble Correspondances a interprété la musique de Charpentier au Japon en 2009. Comment y a-t-elle été reçue ?
S.D. : La première caractéristique des Japonais est d’être très curieux de tout et il y avait beaucoup de monde au concert pour écouter Charpentier, mais également Moulinié et Boësset. Les Japonais sont parfois plus royalistes que le roi et ceux qui s’intéressent à cette musique la connaissent vraiment très bien.
Le programme que vous donnez à Levallois, le 28 avril, préfigure celui de votre prochain CD…
S.D. : Ce sera même quasiment le programme de ce disque, qui a déjà été enregistré et sortira à la rentrée chez Zig Zag. Il est pour l’essentiel composé d’œuvres de Boësset, dont je viens de vous parler, écrites pour le couvent de l’Abbaye de Montmartre, l’une des plus puissantes abbayes parisiennes au XVIIe siècle. Les religieuses bénédictines de Montmartre adoraient la musique et chantaient des motets plutôt que du plain-chant.
Boësset était l’un des compositeurs les plus appréciés et les plus reconnus de temps de Louis XIII. Il savait plaire à la cour avec des airs simples et faciles à retenir et maîtrisait le contrepoint pour produire des pages sacrées telles que celles que nous avons enregistrées. Il s’agit d’une musique très savante sur le papier - le contrepoint est magnifique ! -, qui sonne de façon simple et évidente.
Notre concert de Levallois s’intitule «L’Enigme Deslauriers », par référence au Manuscrit, et je pense que le CD s’appellera « L’Archange et le Lys » parce que toutes les pièces choisies sont liées à l’épisode de l’Annonciation.
Propos recueillis par Alain Cochard, le 12 avril 2011
(1)Zig Zag Territoires ZZT 100601
Concerts de l’Ensemble Correspondances, dir. Sébastien Daucé
23 avril 2011 – à 16h
Œuvres de Marc-Antoine Charpentier
Abbaye Royale de Fontevraud (49)
(Dans le cadre de Pâques à Fontevraud)
Rés : 02 41 51 90 51
28 avril 2011 – 20h 30
Œuvres de Boësset, Du Mont, Moulinié
Auditorium Maurice Ravel
92300 – Levallois-Perret
Rés. : 01 47 15 76 76
Pour en savoir plus sur l’Ensemble Correspondances : www.ensemblecorrespondances.com
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Photo : DR
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