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"Coup de coeur" Carrefour de Lodéon & Concertclassic - Une interview de Julien Chauvin, 1er violon du Quatuor Cambini
Le Quatuor Cambini-Paris affectionne les répertoires rares. Après des enregistrements Devienne-Vachon-Cambini-Boccherini (MBF) et Jadin (Timpani) remarqués, cette jeune formation sur instruments d’époque vient de signer un non moins séduisant CD Félicien David (Ambroisie-Naïve) et se produit le 6 janvier (à 13h) et le 8 janvier (à 11h) à l’Opéra Comique dans un programme Jadin-David-Gouvy. Premier dans la liste des « Coups de cœur » inscrits dans le cadre du partenariat entre Le Carrefour de Lodéon/France Inter et Concertclassic, le Quatuor Cambini répond à nos questions par l’intermédiaire de son premier violon, Julien Chauvin (1er à gauche sur la photo).
Comment avez-vous été amenés à fonder le Quatuor Cambini et à choisir ce nom ?
Julien CHAUVIN : En activité dans des formations orchestrales française ou étrangères ( moi-même au Cercle de l’Harmonie, Atsushi Sakaï comme continuiste chez Christophe Rousset ou chez Emmanuelle Haïm, par exemple) chacun des futurs membres du Quatuor (je précise qu’un changement d’altiste est intervenu depuis sa création en 2007) éprouvait le besoin de créer le pendant chambriste à son activité orchestrale, pour la musique de la fin du XVIIIe siècle qui, s’agissant du répertoire français, demeure trop peu connue. Il y a énormément d’œuvres pour quatuor à cordes de cette période à redécouvrir et nous avions le désir de nous lancer dans cette entreprise sur instruments d’époque. Nous basons toute notre recherche et notre interprétation sur les instruments anciens qui nous passionnent tous les quatre. On apprend beaucoup des instruments, des archets XVIIIe ; on comprend toujours mieux l’écriture, les articulations, les nuances du compositeur avec les outils de l’époque. Nous avons lu beaucoup de musique pour quatuor à cordes de compositeurs français ou de compositeurs étrangers ayant fait carrière en France.
Un certain Giuseppe Maria Cambini par exemple…
J.C. : En effet, le compositeur dont notre formation porte le nom a écrit près de 150 quatuors à cordes. Il a par ailleurs eu une histoire assez rocambolesque. On raconte qu’il aurait quitté l’Italie avec sa fiancée en voyage de noces, avant d’être kidnappé par des pirates, recueilli par un riche marchand et débarqué à Marseille ! Nous avons déchiffré environ 60-70 quatuors de Cambini et nous y avons découvert quelques perles, dont certaines figuraient sur notre premier enregistrement.
Pour quelle raisons avez-vous été séduits par sa musique ?
J.C. : Cambini a retenu notre attention car il s’inscrit vraiment dans son époque mais, du fait de la durée de son existence (1746-1825), passe par des écritures de quatuor différentes, notamment par le « quatuor concertant » ou « quatuor dialogué » ; une forme de conversation musicale « entre gentilshommes» où chacun exprime son point de vue. Une quarantaine de quatuors de Cambini relèvent de ce genre où les instruments s’expriment l’un après l’autre - un peu à la manière des « Razumowsky » de Beethoven un peu plus tard - et où l’alto et le violoncelle occupent une place très importante.
Votre CD Hyacinthe Jadin a beaucoup contribué à vous faire connaître d’un public relativement large…
J.C. : C’est vrai, paradoxalement ai-je envie de dire car nous n’avons pas choisi la facilité en nous dirigeant vers cet auteur quasi inconnu du public et des musiciens. Notre démarche est toujours la même, nous lisons d’abord beaucoup d’œuvres. Le CMBV de Versailles venait de publier l’intégrale des quatuors de Jadin au moment où nous nous sommes lancés à la découverte de cet auteur et nous avons pu aussi travailler avec divers musicologues. En nous plongeant dans la musique d’un créateur dont l’existence fut très brève (1776-1800) nous avons découvert et été touchés par un langage étonnant qui annonce le XIXe siècle.
Vous poursuivez votre parcours discographique sur le mode de la rareté avec les Quatuors nos 1, 2 et 4 de Félicien David (1810-1876). Qu’est-ce qui vous a poussé à aborder cette figure méconnue du romantisme français ?
J.C. : A la suite du disque Jadin, le Quatuor Cambini et Le Cercle de l’Harmonie ont décidé d’avoir une démarche d’enregistrement cohérente en signant un contrat avec Nicolas Bartholomée pour Ambroisie-Naïve. Pour le quatuor comme pour l’orchestre nous avons trouvé en la personne de Nicolas quelqu’un de totalement à l’écoute de nos envies artistiques. Nous avons hésité entre aborder une ou deux grandes œuvres du répertoire et continuer sur la voie de la rareté. Avec Nicolas nous avons choisi de réitérer ce pari, ce défi qui, de nos jours, consiste à présenter des œuvres complètement tombées dans l’oubli. C’est le cas avec Félicien David, au point qu’il a fallu refaire des éditions des quatuors pour pouvoir les jouer. Il y a un certain temps que nous travaillons sur cet auteur que je connaissais pour avoir joué dans un festival ses Saisons pour quintette à cordes.
Avec le Palazetto Bru-Zane nous nous sommes entendus pour nous lancer sur ce compositeur car il n’y avait rien eu de fait encore avant que Christophe Coin ne réalise un enregistrement des Saisons. Nous avons effectué beaucoup de recherches sur David, nous avons souvent joué sa musique en concert depuis presque trois ans. Partout où nous avons donné le 1er Quatuor nous avons été surpris par l’excellent accueil réservé a cette musique. Nous avons donc décidé de demander l’édition des 2ème et 4ème Quatuors : ce programme David s’est assez naturellement imposé pour notre nouvel enregistrement.
Quatuors nos 1, 2 et 4… Et le 3ème ?
J.C. : Il est absent pour deux raisons : les quatre quatuors n’auraient d’abord pas tenu sur un même CD, ensuite Christophe Coin a déjà enregistré le 3ème Quatuor et nous nous sommes entendus afin qu’il n’y ait pas de télescopage entre nos entreprises respectives.
Après Jadin et David, quels sont les projets sur lesquels vous travaillez actuellement ?
J.C. : Il y en a deux en cours : un CD Beethoven et un CD Gouvy (1819-1898). Nous n’allons pas nous arrêter à Jadin et David et tenons à nous engager à fond dans ce répertoire français méconnu qui nous passionne. Gouvy a écrit dix quatuors ; nous en jouons trois (dont un dans notre programme des 6 et 8 janvier à l’Opéra Comique, un autre à Venise en février). Un enregistrement devrait se profiler cette année. Quant au CD Beethoven, il nous empêchera d’être enfermés dans une case. Tout cela devrait être réalisé durant l’année qui s’ouvre.
Propos recueillis par Alain Cochard, le 27 décembre 2011.
Photo (de gauche à droite) : Julien Chauvin, violon – Pierre-Eric Nimylowycz, alto Karine Crocquenoy, violon - Atsushi Sakaï, violoncelle
Prochain Concerts du Quatuor Cambini-Paris
Œuvre de Jadin, David et Gouvy
Le 6 janvier (à 13h) et le 8 janvier (à 11h) 2012
Paris – Opéra Comique
www.opera-comique.com
Centre de Musique romantique de Venise
Œuvre de Gouvy, David et Gounod
12 février 2012
Venise - Palazetto Bru-Zane
www.bru-zane.com
Festival Quatuor à Saint Roch (15-18 mars 2012)
Œuvres de David et Mendelssohn
Samedi 17 mars -16h
Paris – Chapelle du calvaire
www.ars-mobilis.com
A écouter :
Félicien David : Quatuors à cordes nos 1, 2 et 4 (1 CD Naïve-Ambroisie AM 206)
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Photo : DR
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