Ce fut, dans la récente production de Thierry Malandain, basé face à l’océan à Biarritz dans son prestigieux Centre Chorégraphique, l’une des plus belles œuvres de ce maître dit- peut-être à tort- représentant du néo-classicisme chorégraphique classique. L’art de Thierry Malandain, totalement anticonformiste sans être provoquant, serait peut-être celui d’une modernité adulte, ou d’un classique épuré, passé au tamis. Bref, que de bonnes recettes. Celle qu’il concocta pour son Roméo reposa d’emblée sur d’excellentes bases, avec le support de la musique de Berlioz (version Gardiner), que si peu avaient utilisée- Béjart excepté-, en regard du ballet habilement découpé de Prokofiev.

Cet art de l’ellipse de l’œuvre de Berlioz, combiné au dramatisme nu du chorégraphe, a porté les plus grands fruits, Malandain choisissant d’y faire incarner les deux héros par plusieurs danseurs successifs. Le ballet y gagne en intensité humaine ce qu’il y perd peut-être en émotivité à fleur de peau. Et l’intelligence scénique de Malandain a su capter les impératifs de la musique avec une formidable acuité. Décor minimaliste certes, avec des malles qui se muent en murs, bancs ou cercueils, autour d’entrelacements de corps haineux ou amoureux, se happant avec une violence contrôlée, et des idées fabuleuses pour contourner les parenthèses anecdotiques de la partition : ainsi lorsque la messagère Mab est remplacée dans son Scherzo par un Mercutio virevoltant, avant que Tybalt n’en fasse qu’une bouchée.

Depuis sa création en août 2010 à Vérone même, ce Roméo et Juliette est plébiscité partout, et le Théâtre de Saint-Quentin, en l’attrapant au sein d’une tournée qui conduit le Ballet- Biarritz vers l’Italie, montre une fois encore sa clairvoyance dans le choix de sa programmation danse.

Jacqueline Thuilleux

Théâtre de Saint- Quentin en Yvelines, les 27 et 28 mars 2012 / Rens. : www.theatresqy.org

On profitera de ce passage en région parisienne pour s’imprégner de l’univers de Thierry Malandain grâce au magnifique album que lui a consacré le photographe Olivier Houeix, qui le suit pas à pas de puis dix ans : Malandain-Houeix, édité par Malandain Ballet Biarritz 

> Vous souhaitez répondre à l’auteur de cet article ?

> Lire les autres articles de Jacqueline Thuilleux