Puisant aux sources des anciennes légendes nordiques, où de jeunes filles sont transformées en cygne par un terrible maléfice, Tchaikovski compose en 1876 son premier ballet, Le Lac des cygnes, d’une singulière douceur et mélancolie. Comme en écho à sa propre expérience, où l’amour rêvé demeure impossible, la partition se place sous le thème de la fatalité. Mais l’oeuvre restera incomprise jusqu’à ce que Marius Petipa lui donne sa propre lecture chorégraphique en 1895. Il déploie pour le corps de ballet féminin, avec le concours de Lev Ivanov, de majestueuses figures et crée le mythe de la danseuse-cygne, qui deviendra la ballerine par excellence. Dans la version que Rudolf Noureev imagine pour le Ballet de l’Opéra en 1984, le prince Siegfried prend toute son ampleur psychologique. Personnage romantique et déchiré, il fuit une réalité imposée pour se réfugier dans un monde imaginaire et fantastique. Il introduit également la figure de Rothbart, précepteur manipulateur et machiavélique, donnant une dimension plus complexe à ce chef-d’oeuvre du ballet d’action.