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​Aline Piboule au Festival Berlioz 2021 – Festival dans le festival – Compte-rendu

 Non moins de quatre récitals ! Ce dernier Festival Berlioz consacre Aline Piboule, si tant est que la réputation de la jeune pianiste (couronnée par le Concours international d’Orléans en 2014) en ait besoin. Ces concerts d’après-midi dans l’église de La Côte-Saint-André constituent ainsi un panorama marathon des talents multiples et éclectiques de l’artiste.
 
Sur les traces de la grande aînée Marie-Catherine Girod, on retrouve des pages rares de compositeurs français tout aussi rares (Abel Decaux, Louis Aubert, Pierre-Octave Ferroud, Mel Bonis) (1), mais aussi des classiques du répertoire pianistique et des incursions du côté du XXsiècle et de la musique contemporaine. Premier de ces concerts, le récit-récital intitulé « Boutès ou le désir de se jeter à l’eau » associe l’écrivain Pascal Quignard diseur d'extraits de son ouvrage Boutès et de belles pages de Ravel (Oiseaux tristes), Chopin (Prélude Op.28 n°16), l’Andantino de la Sonate D. 959 de Schubert, Die Loreley de Liszt, le 11Nocturne de Fauré, La Colombe de Messiaen, une version pianistique de La Mer de Debussy et La mer, autre, cette fois d’Abel Decaux (le no 4 des Clairs de lune), dans une transmission d’une grande éloquence qui frise la prouesse. On regrette seulement le micro à l’effet résonnant d’un récitant à la voix assez monocorde.
 
Alie Piboule à l'église de La Côte-Saint-André © Bruno Moussier
 
Deuxième programme, « autour de Flaubert », en écho au bicentenaire de la naissance de l’écrivain et à une thématique qui parcourt l’édition 2021. Défilent ainsi Mel Bonis (1858-1937) avec des extraits des Femmes de légende, Florent Schmitt et son Prélude de La Tragédie de Salomé, la Barcarolle de Chopin et le triptyque Sillages de Louis Aubert (1877-1968). Ou autant de pièces en miroir que Feuillet d’album de Chabrier vient ponctuer en bis d’une même essence parfumée.
Puis, le récital « Vanités » confronte Chopin à nouveau (les quatre Ballades, pages célèbres mais renouvelées par l’élan et l’énergie), Liszt (Bénédiction de Dieu dans la solitude), au compositeur britannique Thomas Adès (né en 1971) avec Darknesse Visible (1992) d’après John Dowland ; une pièce en forme de grande fresque entrecoupée d’un intermède rafraîchissant. Petit bis avec Federico Mompou et un extrait de sa Música callada.
 
Retour aux musiques françaises pour le dernier récital conjuguant Charles Koechlin (extraits de Paysages et Marines, dans ses couleurs polytonales), César Franck (Prélude choral et fugue), Abel Decaux (1869-1943) et ses Clairs de lune, avec le plus rare encore Pierre-Octave Ferroud (1900-1936) et ses Types ou caricatures de personnages en musique. On passe ainsi de la luxuriance à l’originalité (chez Ferroud) et l’étrangeté (chez un Decaux quasi atonal, en 1907 !), transmis entre virtuosité, dextérité, sensibilité et épanchement. Un parcours sans faille ! Les bis jouent de la délicatesse avec une Romance de Fauré et le Clair de lune, de Debussy.
Un chemin en quatre étapes à travers des sentiers divers et détournés, comme une épopée où la technique transcendée le dispute à l’émotion : festival dans le festival, un festival Piboule !
 
Pierre-René Serna

(1)  Reprenant en grande partie le programme de son disque récemment paru sous le label Printemps des Arts de Monte-Carlo
 
La Côte-Saint-André, église ;  22, 23, 25 et 26 août 2021 / Festival Berlioz, jusqu’au 30 août : www.festivalberlioz.com
 
Photo © alinepiboule.fr

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