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Compte-rendu : Wilhem Latchoumia en récital à l’Opéra Comique - Un simplicité émerveillée
Venues du Capitole de Toulouse, Les Fiançailles au couvent qu’accueille la salle Favart ont toutes les chances de s’inscrire parmi les plus belles productions lyriques vues à Paris cette saison. Parallèlement à ce spectacle finement mis en scène par Martin Ducan et mené par la preste et poète baguette de Tugan Sokhiev à la tête de ses musiciens toulousains, la série des « Rumeurs » aura donné lieu à un singulier récital.
Devant le piano à queue ou le toy piano qui l’accompagne souvent dans ses concerts, Wilhem Latchoumia frappe par l’émerveillement qui le caractérise continûment face à la musique. Depuis qu’on a découvert cet artiste (né en 1974) au moment de sa victoire au Concours de Piano XXe siècle d’Orléans en 2006, les occasions n’ont pas manqué d’apprécier son jeu tout à la fois virtuose, intelligent, coloré et sensuel et son goût pour des programmes hors des sentiers battus.
L’ancien élève d’Eric Heidsieck et de Gery Moutier au CNSM de Lyon est de ceux qui savent proposer, sans démagogie aucune, une conception nouvelle du récital de piano – domaine de la musique classique où un petit coup de plumeau n’est pas forcément malvenu.
Des extraits des Pièces pour piano op 95, 97 et 102 que Prokofiev a tirées du ballet iCendrillon forment la colonne vertébrale d’un original programme intitulé « Un bal russe », où Latchoumia a en outre inclus des pages de HeitorVilla-Lobos (la musique latino-américaine est une terre d’élection du pianiste), Gérard Pesson, Stephen Montague et Henry Cowell.
Qu’on aime ce Prokofiev plein de poésie et de caractère, d’une impeccable précision rythmique, mais débarrassé de tout le tranchant soviétique qui l’a souvent plombé. Les mains immenses de Latchoumia dansent sur le clavier, éveillent les timbres et épinglent l’atmosphère exacte - en un clin d’œil !
Aux confins du silence, les deux pièces de Gérard Pesson (le funèbre O Hand for Orlando !- à la mémoire de Dominique Troncin - et La Lumière n’a pas de bras pour nous porter) forment une oasis de rêve, un espace d’apesanteur au sein de chacune des parties du récital. Dans l’infinitésimal, elles démontrent que Latchoumia aime la musique certes, mais aussi – chose bien plus rare qu’on ne l’imagine chez les interprètes… – la matière sonore (La Lumière n’est que frottement des touches muettes par les doigts ; étrange bruissement juste « tacheté » de quelques notes). Quant à cet Almost Lullaby de Montague pour piano-jouet, ces Fairy Bells de Cowell (avec cordes pincées par la main droite) ou encore cette jolie page (pour piano-jouet) de Philippe Régana donnée en second bis, en entendant Latchoumia les jouer avec une simplicité émerveillée on se dit que cet interprète est rudement bien armé contre la routine et la grisâtrerie blasée qui affectent certains parfois bien tôt …
Dernier épisode des « Rumeurs » des Fiançailles mercredi 2 février avec le Quatuor Ludwig et François Marthouret pour un « Chostakovitch en lettres et en musique ».
Alain Cochard
Paris, Opéra comique, 29 janvier 2011
www.opera-comique.com
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Photo : Laetitia Perbet
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