Journal
Fin de saison du Centre de Musique de Chambre de Paris à la Salle Cortot – Découvertes et bonheurs printaniers – Compte-rendu
Il se produit à Cortot, accompagné avec sensibilité par Bianca Chilemmi (photo à dr.), une disciple de la merveilleuse Anne le Bozec, dans le Winterreise de Schubert ; une moitié du cycle seulement (les douze lieder allant de Die Post à l’ultime Der Leirmann ) – le premier volet de la soirée est toujours bref au Centre de Musique Chambre.(1) On regrette de ne pas entendre la totalité de l’ouvrage, mais c’est en tout cas largement assez pour juger des qualités de F. Hille. Une voix tout à la fois riche et claire, jamais charbonneuse dans les graves, d’une remarquable homogénéité. Magnifique instrument pour une interprétation d’une sobriété habitée, que l’artiste cultive grâce à la complicité attentive de B. Chilemmi. Le refus de l’emphase, le naturel et la simplicité avec lesquels F. Hille distille les mots et cerne le caractère de chacun des poèmes rendent impatient de retrouver sur scène un chanteur à suivre de près.
Seconde partie de soirée toute brahmsienne : Shuichi Okada (violon), Eva Zavaro (violon), Manuel Vioque-Judde (alto), Violaine Despeyroux (alto), Bumjun Kim (violoncelle), Elisa Huteau (violoncelle) et Clément Lefebvre ( piano) sont réunis. La 5ème Danse hongroise, pleine de chien sous l’archet d’Okada, ouvre le programme, suivie – enchaînement bien trouvé – par le Rondo alla zingarese conclusif du Quatuor avec piano op. 25 n°1, d’une ardeur et d’une saveur auxquelles nul ne résiste.
Ample, intensément lyrique et richement timbré, l’Intermezzo op. 117 n° 2 par C. Lefebvre – pianiste à suivre, on vous l’a déjà dit (2) – offre un bel intermède poétique et prélude au morceau de résistance du programme, le 1er Sextuor, qui rassemble tous les archets précités. Debout (pour les violons et altos) et tous sans partition : la règle que J. Pernoo impose fait une fois encore des merveilles. Les musiciens s’emparent de l’ouvrage avec un souffle et une liberté magnifiques. « Sextuor du Printemps » : le titre donné à l’Opus 18 paraît on ne peut plus justifié dans cette interprétation rayonnante de jeunesse et de belle complicité.
Pour conclure, on n’oublie pas le « Freshly composed » proposé comme de coutume au Centre de Musique de Chambre entre les deux volets de la soirée. J. Pernoo a convié Emile Sécheret (17 ans), l’un de ses élèves violoncellistes, qui nourrit aussi une passion pour la composition (il étudie avec Stéphane Delplace, présent dans l'assistance). Silhouette longiligne surmontée d’une tignasse blonde, l’apparition au piano du jeune homme aura été brève mais, pas de doute, il manifeste déjà un langage personnel et un sens affirmé de la couleur harmonique. Sécheret est de ceux qui n’éprouvent pas le besoin d’écrire « désagréable » et gris souris pour se donner l’air inspiré. Laissons le temps faire son œuvre – et ... retenez déjà son nom !
Alain Cochard
(2) Lire le CR : www.concertclassic.com/article/clement-lefebvre-et-le-quatuor-abegg-aux-pianissimes-le-peps-et-la-tendresse-compte-rendu
Paris, Salle Cortot, 24 mars 2017
Photo © Centre de Musique de Chambre de Paris
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