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Le Te Deum de Berlioz à la Philharmonie de Paris – Fastueux - Compte-rendu

Pour le Te Deum de Berlioz dans la grande salle de la Philharmonie de Paris, François-Xavier Roth emploie les grands moyens : quelque 550 interprètes, entre un orchestre de 150 instrumentistes, réunissant Les Siècles et le Jeune Orchestre Européen Hector-Berlioz (émanation du Festival Berlioz), les uns et les autres sur instruments d’époque (saxhorns et ophicléides inclus), et 400 choristes, dont des chœurs d’enfants de 250 élèves. Mêlant professionnels et amateurs, et pour ces derniers, notamment les enfants choristes, un encadrement mené pendant une année (sous la houlette de Sofi Jeannin). Un beau projet ! à la fois pédagogique et social, comme a tenu à le marquer Roth lors de sa petite allocution de fin de concert.
 
Les Cris de Paris, mais aussi les ensembles vocaux Otrente et Stella Maris, le Chœur de la Philharmonie du Coge (issu des Grandes Écoles), forment donc compagnie à la Maîtrise de Radio France, au Singapore Symphony Children’s Choir, et à des chorales venues de collèges de Seine-Saint-Denis, Créteil et Paris. On approche ainsi des effectifs réunis par Berlioz pour la création de son ouvrage à Saint-Eustache (960 participants, dont 800 choristes) (1). Bien qu’il ait tenu par la suite à préciser la possibilité de masses moins considérables : « il n’y a pas besoin de mille exécutants dans cette affaire ». Mais la Philharmonie, vaste nef à l’instar d’une certaine façon de l’église Saint-Eustache, s’y prête. Néanmoins, le volume en rondeurs s’y conforme moins, et l’on comprend que dans ce contexte on ait renoncé aux répartitions spatiales (à l’encontre du Roméo et Juliette de Berlioz par le même Roth, en mars dernier à la Philharmonie). Selon les souhaits du compositeur : le double chœur et l’orchestre opposés à l’orgue à l’autre extrémité du public, le chœur d’enfants isolé. Ici, tout est d’un bloc, regroupé sur la scène et l’arrière scène (les chœurs), combiné aux haut-parleurs de l’orgue électronique (en attente de celui de la salle devant être inauguré en septembre).
 
Le rendu sonore perd en relief, comme en individualité des timbres. L’unité, donc, s’en dégage. Au mieux. Il fallait ainsi, devant cette foule, savoir jauger les balances, tout en maintenant les arrêtes. Roth est à son affaire, avec l’aide de Michel Tranchant, chef de chœur, dans une direction sans cesse maîtrisée, des plus sublimes débordements hymniques jusqu’aux infinies délicatesses en prières de cette œuvre faite d’amples figures contrastées. Le nombreux chœur d’enfant se fait toutefois discret contrepoint dans son unisson, effet de son fondu dans la masse. L’orgue, sous les doigts de Daniel Roth (père de François-Xavier), sonne un peu rêche et dru, avec sa couleur synthétique. Mais l’ensemble emporte tout. Jean-François Borras parvient à lancer son timbre élégiaque du Te ergo quæsumus face à des voix rassemblées comme un seul homme (et femme).
 
On notera la place de la « Marche pour la présentation des drapeaux », curieusement entre le Dignare et le Christe Rex gloriæ, page non facultative bien que signalée pour une cérémonie particulière, devant normalement conclure ladite cérémonie et l’œuvre. Et l’absence du « Prélude », également instrumental, prévu après le Tibi omnes, mais lui purement facultatif (pour « une cérémonie d’action de grâce »).
 
Pierre-René Serna
 
(1) La disposition du Te Deum, soliste, double chœur, chœur d’enfants et orgue, est celle-là même de la Huitième Symphonie de Mahler, comme le souligne Henry-Louis de La Grange.

Paris, Philharmonie 1, 20 juin 2015
 
Le Te Deum sera repris en quasi-ouverture du Festival Berlioz (www.festivalberlioz.com), au théâtre antique de Vienne, le 21 août, toujours sous la direction de François-Xavier Roth. Avec cette fois 600 enfants chanteurs. Ainsi qu’il en fut à la création de l’œuvre.

Photo © www.francoisxavierroth.com

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