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Philippe Hersant à l’Orchestre Lamoureux – Poésie du tombeau - Compte-rendu
Philippe Hersant figure un compositeur phare de notre époque. À la tête d’une œuvre abondante, il est l’un des rares à connaître ses ouvrages régulièrement programmés (et l’un des rares à pouvoir vivre de sa plume), qui plus est avec de constantes reprises. Cas exceptionnel pour la musique dite contemporaine, où souvent les créations se succèdent sans lendemain.
Marco Parisotto © Raul Rincon
Ainsi du Tombeau de Virgile, créé en 2006 (au Théâtre des Champs-Élysées avec l’Ensemble orchestral de Paris, commande de Musique nouvelle en liberté), repris ensuite en Allemagne (à Ingolstadt), et cette fois encore dans le cadre de la saison de l’Orchestre Lamoureux. L’œuvre entend être une évocation de la tombe (présumée) de Virgile, lieu de sérénité et de recueillement dans une Naples agitée. Elle avait été écrite à la demande de la harpiste Isabelle Moretti, qui en est la dédicataire. Mais davantage qu’un concerto pour harpe et orchestre, formule en soi déjà originale, la pièce privilégie l’atmosphère, rêveuse et élégiaque, où les gouttes de l’antique instrument soliste se conjuguent dans le dialogue avec les instruments éparpillés de l’orchestre, d’un chatoiement de rappels thématiques : tarentelle, chanson napolitaine, chant de la Sybille… Un climat d’outre-tombe, avec cette couleur modale d’une poésie évanescente dont le compositeur a le secret.
Et le public de ce concert, dans l’acoustique intensément présente de la Salle Gaveau, de réserver un accueil triomphal, avec rappels – des plus inhabituels pour un compositeur. Il faut dire que les interprètes méritent tout autant : d’Isabelle Moretti elle-même, avec une dextérité sensible au-delà de toute virtuosité (et jouant de mémoire, sans aucune partition sous les yeux), à un Orchestre Lamoureux d’une précision emportée sous la battue fouillée de Marco Parisotto. Ces derniers, avec des vertus comparables, livrent en introduction de miroitants fragments symphoniques du Festin de l’Araignée de Roussel, et, en clôture de concert, une Symphonie de Franck acerbe comme rarement. Quelle belle phalange !
Pierre–René Serna
Paris, Salle Gaveau, 8 février 2015.
Photo © A. Yanez
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