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Sergey Khachatryan et Daniele Gatti inaugurent la saison de l’Orchestre National de France – Poète violoniste – Compte-rendu
C’est la rentrée ! A Radio France, les deux phalanges ont donné leur concert d’ouverture à une journée d’intervalle. L’Orchestre National et Daniele Gatti ouvrent la marche. Concerto pour violon de Beethoven et Symphonie fantastique de Berlioz : ces deux inoxydables opus ont attiré un public très nombreux dans l’Auditorium flambant neuf de la Maison Ronde. Le soliste invité n’est sûrement pas pour rien non plus dans l’attrait exercé par ce programme car, avec Sergey Khachatryan (photo), l’un des plus immenses violonistes de notre temps est à l’œuvre.
Poète violoniste vaut-il mieux dire, tant la prestation de l’artiste arménien transcende la dimension technique pour ne songer qu’à la musique. Tempi larges, oui et alors ? Quant un interprète possède une telle sonorité, une telle intelligence du son plutôt, cette longueur d’archet, ce sens de la ligne, il peut se le permettre. Et que ce jeu ample, « à l’ancienne » fait du bien à l’oreille par comparaison avec tant de virtuoses brillants, pressés et surtendus.
Khachatryan chante et fait preuve d’un admirable sens des nuances tout au long d’une interprétation où sa corde de mi – tellement sollicitée dans l’Opus 61 - n’est jamais prise en défaut de justesse et de pureté jusqu’au terme d’un Rondo final dont la joie et la luminosité sont contrebalancées par la raucité de certains accents. Avec un peu trop de pesanteur sans doute, mais une indéniable qualité d’écoute, Daniele Gatti se fait le complice de son soliste. En bis, l’Andante de la Sonate n° 2 BWV 1003 de Bach a l’allure d’un dialogue avec l’infini...(1)
Après la pause, Gatti et ses musiciens s’emparent avec une belle énergie de la Fantastique. Le résultat n’est pas sans efficacité et accroche l’oreille sans pour autant toujours convaincre. Le patron du National fouille les détails de la partition de manière un peu trop insistante. A force, la magique Scène aux champs tombe à plat. Le hautbois en coulisse est une fausse bonne idée (de la place que nous occupons en tous cas), on ne l’entend pas assez ; tout comme les cloches du mouvement final, installées au même endroit, rateront leur effet. Mais, malgré le clinquant qui les accompagne (dans la Marche au supplice en particulier), l’élan et la sauvagerie de la conception d’ensemble ne sont pas sans atout.
Enfin, alors que Daniele Gatti quitte la direction musicale de la formation à la fin de la saison – et qu’en parallèle le Philharmonique entame une aventure que l’on pressent passionnante sous la baguette de Mikko Franck - espérons qu’une décision sera rapidement prise quant à sa succession afin de d’offrir aux membres du National la perspective d’avenir qui leur manque tant aujourd’hui.
Alain Cochard
(1) On rappellera qu’en 2008-2009 Khachatryan a gravé l’une des plus fabuleuses versions des Sonates et Partitas qui se puissent trouver ( 2CD Naïve – V 5181)
Paris, Auditorium de Radio France, 17 septembre 2015
Photo © DR
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