La chose est évidente depuis le départ, la nomination de Thomas Hengelbrock à la tête de l’Orchestre de chambre de Paris est la meilleure chose qui pouvait arriver à la formation après la disparition prématurée de Lars Vogt. Chaque apparition du directeur musical nous en convainc et le programme Strauss-Bruckner qu’il proposait au théâtre des Champs Elysées n’a pas fait exception.
 

© Orchestre de chambre de Paris

Brève, la première partie de soirée n’est est pas moins très dense, occupée par les Métamorphoses pour cordes de Richard Strauss. Une partition sombre, certes, mais que le chef se garde de noircir à l’excès, à rebours de la conception plombée et sans issue – « accablée par le cataclysme » dirait Furtwängler – dont elle est parfois l’objet. L’homogénéité d’ensemble à laquelle Hengelbrock parvient à la tête des vingt-trois archets va de pair avec un souverain équilibre et une parfaite lisibilité dans le déploiement de la polyphonie (mention spéciale pour le remarquable Bogdan Bozovic, violon solo supersoliste invité). Une musique empreinte de gravité mais dont le lyrisme se fait consolateur sous une très humaine battue. Elle laisse in fine la porte ouverte sur un espoir – de renaissance ...
 
Dans cette optique, la présence de la rare Symphonie n° 6 de Bruckner, de surcroît dans l’interprétation qu’en propose Hengelbrock, fait pleinement sens. Très allante (40’), l’approche n’en demeure par moins fouillée et solidement architecturée. La douleur surmontée de l’Adagio donne tout son sens à la vitalité du Majestoso, au Scherzo, époustouflant de vigueur et de netteté dans la mise en place, et au Finale où le chef se montre attentif au « pas trop rapide » indiqué par le compositeur. Et la musique de s’épanouir avec une plénitude et une beauté des timbres qui forcent l’admiration. L’espoir n’a pas été déçu ...
 
Alain Cochard