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Sabine Devieilhe et François-Xavier Roth à la Philharmonie de Paris – La vérité du concert - Compte rendu
Sabine Devieilhe et François-Xavier Roth à la Philharmonie de Paris – La vérité du concert - Compte rendu
Décevante au disque où sa personnalité s'efface au profit d'un instrument étincelant mais assez inexpressif, Sabine Devieilhe (photo) semble aujourd'hui comme hier avoir besoin du public pour se livrer plus naturellement. Réalisé avec scrupule, son dernier album publié chez Erato et joliment baptisé « Mirages », la présente sous les traits d'une élégante, quoique distante, colorature, dont le chant diaphane à la technique huilée manque de chaleur et de carnation malgré l'accompagnement cousu main de François-Xavier Roth à la tête des Siècles ; absolument admirable de fantaisie, de finesse et d'alacrité qu'il s'agisse des ouvertures de Mignon et de celle, tout à fait piquante, de La princesse jaune de Saint-Saëns ou des extraits tirés de Coppelia, subtilement intégrés à ce programme.
Le concert donné par les mêmes interprètes à la Philharmonie souffre bien moins de cette réserve – est-ce de la timidité ? – qui réfrigèrent les prestations de la soliste en studio. Absente de l'album, la Polonaise de Philine « Je suis Titania la blonde » (Mignon) permet il est vrai à la cantatrice de réchauffer immédiatement l'assistance avec ces cascades de vocalises brillamment exécutées, ces chromatismes et ces envolées aériennes vers l'aigu déployées avec allégresse. « La mort d'Ophélie » extraite de Tristia, accompagnée ici par l'orchestre – et non par Alexandre Tharaud comme dans « Mirages » dont les sonorités soyeuses et vaporeuses ajoutent aux mystères de cette superbe page berliozienne, précédant de peu celui de la folie d'Ophélie « A vos jeux mes amis » tirée de l'opéra de Thomas, scène délicatement poignante où l'héroïne perd la raison en évoquant son amour impossible pour Hamlet : sans posséder le génie vocal et la dimension dramatique de Callas, capable d'investir chaque parole pour révéler les fêlures de ce personnage broyé, Sabine Devieilhe s'empare de ce répertoire avec adresse sans que ses coloratures n'affadissent le propos.
Les parfums de l'Inde et les fantasmes liés à l'Orient succédaient à Shakespeare avec Quatre poèmes hindous de Maurice Delage, abordés d'une voix planante et des accents évanescents, puis le ravissant air de Madame Chrysanthème de Messager « Le jour sous le soleil béni », autrefois défendu par Mady Mesplé, elle-même célèbre pour son incarnation de Lakmé. Le fait que Sabine Devieilhe et François-Xavier Roth se soient rencontrés pour interpréter cet opéra de Delibes n'est pas anodin, les deux artistes ayant en commun une passion pour ce compositeur et une œuvre qui n'a jamais quitté la scène depuis sa création.
Chantées avec un goût infaillible et une réelle puissance évocatrice « Les fleurs me paraissent plus belles » et leurs impalpables nuances, suivies par l'incontournable « Air des Clochettes », divinement exécuté, font désormais partie de l'ADN de la soprano qui n'en finit pas d'éblouir dans ce rôle de Lakmé qui lui colle à la peau. L'aigu tout juste moins tenu qu'au disque est toujours aussi éblouissant, ce qui fascine le public heureux que celle-ci ait choisi comme premier bis « Tu m'as donné le plus doux rêve », les troublants adieux à la vie de la fille du brahmane, traduits ici avec une belle intensité, le piano qui attendait patiemment son heure étant utilisé pour une second rappel par Alexandre Tharaud lui-même, venu spécialement accompagner la cantatrice dans la délicate Romance d'Ariel écrite par Debussy en 1883. Plus concernée, plus imaginative et plus pertinente qu'au disque, Sabine Devieilhe terminait ainsi son concert en beauté.
François Lesueur
Le concert donné par les mêmes interprètes à la Philharmonie souffre bien moins de cette réserve – est-ce de la timidité ? – qui réfrigèrent les prestations de la soliste en studio. Absente de l'album, la Polonaise de Philine « Je suis Titania la blonde » (Mignon) permet il est vrai à la cantatrice de réchauffer immédiatement l'assistance avec ces cascades de vocalises brillamment exécutées, ces chromatismes et ces envolées aériennes vers l'aigu déployées avec allégresse. « La mort d'Ophélie » extraite de Tristia, accompagnée ici par l'orchestre – et non par Alexandre Tharaud comme dans « Mirages » dont les sonorités soyeuses et vaporeuses ajoutent aux mystères de cette superbe page berliozienne, précédant de peu celui de la folie d'Ophélie « A vos jeux mes amis » tirée de l'opéra de Thomas, scène délicatement poignante où l'héroïne perd la raison en évoquant son amour impossible pour Hamlet : sans posséder le génie vocal et la dimension dramatique de Callas, capable d'investir chaque parole pour révéler les fêlures de ce personnage broyé, Sabine Devieilhe s'empare de ce répertoire avec adresse sans que ses coloratures n'affadissent le propos.
Les parfums de l'Inde et les fantasmes liés à l'Orient succédaient à Shakespeare avec Quatre poèmes hindous de Maurice Delage, abordés d'une voix planante et des accents évanescents, puis le ravissant air de Madame Chrysanthème de Messager « Le jour sous le soleil béni », autrefois défendu par Mady Mesplé, elle-même célèbre pour son incarnation de Lakmé. Le fait que Sabine Devieilhe et François-Xavier Roth se soient rencontrés pour interpréter cet opéra de Delibes n'est pas anodin, les deux artistes ayant en commun une passion pour ce compositeur et une œuvre qui n'a jamais quitté la scène depuis sa création.
Chantées avec un goût infaillible et une réelle puissance évocatrice « Les fleurs me paraissent plus belles » et leurs impalpables nuances, suivies par l'incontournable « Air des Clochettes », divinement exécuté, font désormais partie de l'ADN de la soprano qui n'en finit pas d'éblouir dans ce rôle de Lakmé qui lui colle à la peau. L'aigu tout juste moins tenu qu'au disque est toujours aussi éblouissant, ce qui fascine le public heureux que celle-ci ait choisi comme premier bis « Tu m'as donné le plus doux rêve », les troublants adieux à la vie de la fille du brahmane, traduits ici avec une belle intensité, le piano qui attendait patiemment son heure étant utilisé pour une second rappel par Alexandre Tharaud lui-même, venu spécialement accompagner la cantatrice dans la délicate Romance d'Ariel écrite par Debussy en 1883. Plus concernée, plus imaginative et plus pertinente qu'au disque, Sabine Devieilhe terminait ainsi son concert en beauté.
François Lesueur
Paris, Philharmonie (Grande Salle), 14 novembre 2017
Photo © Piergab
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