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Benjamin Grosvenor, Leonard Slatkin et l’Orchestre National de Lyon – Paris-Londres – Compte-rendu
Désormais directeur musical honoraire de l’Orchestre national de Lyon (après en avoir été directeur musical de 2011 à 2017) (1), Leonard Slatkin (photo) a su nouer au fil des ans une relation privilégiée avec cette formation. Le Bœuf sur le toit de Milhaud, Concerto pour piano n° 2 de Saint-Saëns, Symphonie n° 1 d’Elgar : le programme paraît un certes un tantinet disparate, mais on se laisse volontiers tenter par ce Paris-Londres, compte tenu de la présence de Benjamin Grosvenor au clavier et, plus encore, par le choix de l’Opus 55 du compositeur anglais, chef-d’œuvre symphonique superbement ignoré par les phalanges françaises.
Benjamin Grosvenor © Patrick Allen / Opera Omnia
Avant de goûter à l’exception lyonnaise, on ne boude pas le Bœuf sur le toit (1919) d’un Milhaud encore tout empli des souvenirs de son séjour brésilien. Une partition bigarrée dont le chef américain, sans précipiter les choses mais avec un beau tonus rythmique, met en valeur les saveurs polytonales. Un seul regret : du fait de l’effectif réduit, la musique semble un peu perdue dans le vaste Auditorium de Lyon et son impact s’en trouve diminué.
Le temps de l’installation du piano et voilà Benjamin Grosvenor qui attaque le fameux Concerto en sol mineur de Saint-Saëns. L’approche de l’Andante sostenuto témoigne d’un esprit très libre et si cette humeur improvisée permet au pianiste britannique d’ouvrir de beaux espaces poétiques, elle a pour contrepartie de freiner l’élan et briser quelque peu la grande ligne de cet épisode. On ne peut en revanche que se montrer admiratif de la digitalité ailée de l’Allegro scherzando et de l’énergie joyeuse mais jamais triviale du finale, même si Grosvenor, impeccablement suivi par Slatkin, ne déploie pas la myriade de couleurs d’un Bertrand Chamayou dans cette partition – pour se limiter à un admirable exemple récent. On adhère sans réserve en revanche à l’Erotik op. 43 n° 5 de Grieg, vécu avec une poésie intense, que le jeune artiste britannique offre en bis.
Hans Richter, son créateur, qualifiait la Symphonie n° 1 d’Elgar de « plus grande symphonie des temps modernes » et, de fait, l’Opus 55 connut un immense succès international dans la foulée de sa première exécution à Manchester en 1908. Slatkin aime et comprend cette œuvre. Sachons lui gré d’avoir amené les instrumentistes lyonnais à se plonger dans un immense flux musical dont il domine le cours avec une sereine maîtrise et une attention aux parties intermédiaires qui rendent parfaitement lisible les métamorphoses de l’entêtant thème initial. Une interprétation lyrique et foisonnante, jamais pompeuse ; à tous les pupitres, l’Orchestre national de Lyon se distingue par son engagement et le fini de son exécution : applaudissements nourris - et amplement mérités !
Alain Cochard
(1) Nommé il y a peu directeur musical de l’OnL, Nikolaj Szeps-Znaider prendra ses fonctions en septembre 2020.
Lyon, Auditorium, 17 janvier 2019
Photo © Steve J. Sherman
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