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John Eliot Gardiner dirige l’Orchestre philharmonique de Radio France – Accord parfait – Compte-rendu
Le programme de ce concert se signale par une rare cohérence, qui fait cohabiter Harold en Italie de Berlioz, In the South (Alassio) et Sospiri d’Edward Elgar - thématique italienne donc, mais teintée aux couleurs britanniques. Quand on sait que la « Symphonie avec alto principal » de Berlioz s’inspire de Byron et combien les Britanniques, et Gardiner tout le premier, se sont appropriés Berlioz. Alors que dans ses deux pages italiennes, Elgar puise davantage à la tradition symphonique de son pays ; avec une place à l’alto soliste dans Alassio, qui a pu faire la faire qualifier par un de ses biographes « Edward in Italy ». Un couplage parfait !
La première partie de soirée, réservée à la symphonie de Berlioz, atteint d’emblée un sommet. Le Philharmonique de Radio France sonne comme rarement, timbres acerbes sans vibrato, dynamique, accents, attaques : un Harold en Italie comme au premier jour et comme sait le renouveler John Eliot Gardiner dans son état originel, par ses indications précises et sa direction pointilleuse. Dans le mouvement final, « Orgie des brigands », tous les instrumentistes de se lever pour lancer d’un seul élan l’orgie orchestrale.
Antoine Tamestit © Christophe Abramowitz / Radio France
La partie soliste revient à l’alto inspiré autant que rêveur d’Antoine Tamestit, qui déambule sur le plateau et jusqu’au fond pour le quatuor qu’il forme avec deux violons et un violoncelle (indiqués lontano sur la partition) lors du rappel final de son thème, dans une promenade allante comme son interprétation. Ce qui est tout à fait l’esprit théâtral de l’œuvre (qui ne se conforme guère aux préceptes de la forme concerto). Tamestit triomphant, dans cette œuvre qu’il porte en lui ! On note cependant que la répartition instrumentale de la phalange demeure celle coutumière (des violons aux contrebasses) alors que Gardiner opte souvent pour une distribution d’époque (des premiers violons jusqu’aux seconds violons) – le poids des habitudes ... Cette interprétation d’exception est toutefois celle de la seconde soirée (le 5 février), alors que, selon un ami témoin des deux concerts, lors du concert de la veille (capté par France Musique et filmé par Arte Concert (1) elle n’aurait semble-t-il pas atteint au même degré de perfection.
© Christophe Abramowitz / Radio France
Après l’entracte, place à Elgar pour deux pièces plus brèves.(2) L’ouverture de concert In the South retentit d’abord, exacerbée dans son florilège orchestral démonstratif, pour ensuite laisser place au calme pourvu du solo de l’alto toujours évanescent de Tamestit. Sospiri s’ensuit, courte page toute intérieure sur un tapis de cordes et de harpes, dans une intensité vaporeuse.
Accueil final triomphal, de la part du public de l’Auditorium de la Maison de la Radio, mais aussi des membres de l’orchestre, qui éclatent en applaudissements à l’adresse du chef. Entre le Philhar de Radio France et Gardiner, l’accord est décidément parfait !
Pierre-René Serna
(1) Concert à réécouter pendant un mois sur le site francemusique.fr, et regarder pendant un an sur Arte Concert.
(2) In the South et Sospiri figurent au côté de l’admirable version des Enigma Variations dans l'album Elgar que Gardiner a enregistré avec l’Orchestre Philharmonique de Vienne au tout début des années 2000 (DG 463 265-2).
Paris, Auditorium de Radio France, 5 février 2022.
Photo © Christophe Abramowitz / Radio France
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