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Présentation des Solistes de l’Atelier Lyrique de l’Opéra de Paris - D’un bon pied ! - Compte-rendu
Studio Bastille archicomble : le public a répondu à l’appel pour le concert de présentation des solistes de l’Atelier lyrique de l’Opéra, inscrit dans le cadre des « Jeudis de Bastille ». Un vrai régal l’attend une heure durant, chacun des chanteurs ayant été laissé libre de choisir la mélodie ou l’air dans lequel il souhaite se produire, accompagné selon les cas par Philip Richardson, Jorge Giménez ou Adrià Gràcia Gàlvez. Le résultat : un programme varié et contrasté, délicieusement fourre-tout, qui fait un bien fou à une époque où l’on englue trop les atomes à coup de thématiques et de fils conducteurs.
Peu de nouveautés en cette rentrée à l’Atelier lyrique (on note seulement l’arrivée du baryton Piotr Kumon et du pianiste-chef de chant Adrià Gràcia Gàlvez) ; d’abord le bonheur de retrouver de jeunes chanteurs qui démontrent qu’ils ont tiré le meilleur parti du temps passé dans l’institution dirigée par Christian Schirm – et qu’ils attaquent la rentrée d’un bon pied ! Du bonheur et une belle surprise pour commencer. João Pedro Cabral ouvre le concert avec Guitare ; l’assurance et le charme enjôleur avec lesquels il croque la mélodie de Massenet montrent qu’un déclic s’est produit chez le jeune ténor et qu’il a trouvé une aisance scénique qui lui manquait jusqu’alors. L’émission vocale s’en ressent ; pour le meilleur ! Elle aussi accompagnée par Jorge Giménez, Armelle Khourdoïan (sop.) aborde Le Feu de L’Enfant et les sortilèges avec une vivacité et une fraîcheur poétiques doublées d’un beau sens du style. Dans un tout autre répertoire on goûte autant celui de la mezzo Agata Schmidt dont la voix ample mais admirablement maîtrisée, le timbre riche et ambré, le sens du phrasé émeuvent au cours d’un Von ewiger Liebe brahmsien porté par le jeu subtil de Philip Richardson. Avec Adrià Gràcia Gàlvez au clavier, Pietro Di Bianco (baryton-basse) enlève l’air de Leone «Principessa infelice…» de Tamerlano (Haendel) avec autant de virtuosité que de virilité.
En cette matière Tiago Matos (photo) est un Don Giovanni en puissance. Entré l’an dernier à l’Atelier, le baryton brûle les planches dans le « Finch’han dal vino ». Vivement le jour où il s’emparera du rôle en entier ! Après l’éclat solaire de ce morceau, Jorge Giménez (photo) montre sa capacité d’adaptation et son sens des climats s’immergeant instantanément dans la tendre poésie de l’air « Una furtiva lagrima » : le ténor Oleksyi Palchykov y manifeste un style, un sens de la ligne et de la demi-teinte admirables.
Nouvelle recrue de l’Atelier, Piotr Kumon aborde le « Hai già vinta la causa » du Comte (Nozze di Figaro) avec une présence et des moyens indéniables, mais qui demandent à s’affiner, à se nuancer : il vient d’entrer à l’Atelier dans ce but, donnons du temps au temps. Adrià Gràcia Gàlvez reste au clavier pour accompagner ensuite – avec quelle merveilleuse délicatesse ! – le « Adieu notre petite table » de Manon, interprété par une Olga Seliverstova touchante, vibrante mais dénuée d’emphase.
Voix riche et personnalité affirmée, la soprano Elodie Hache s’attaque à l’air de Serena « My man’s gone now » (Porgy and Bess).Une parfaite réussite, à laquelle le peps et la précision rythmiques de Philip Richardson contribuent aussi. Le pianiste est autant à son aise dans les couleurs tendres de La Vierge de Massenet dont la soprano Andreea Soare interprète le célèbre «Rêve infini, divine extase » avec une poésie simple et radieuse : l’auditoire est sous le charme.
Au pianiste britannique de conclure, en compagnie d’Andriy Gnatiuk. Beau brun, le chanteur n’a pas la carrure d’armoire à glace de certaines basses : on est d’autant plus frappé par l’ampleur et la qualité d’un matériau vocal employé avec une musicalité sans faille dans la Cavatine d’Aleko tirée de l’ouvrage de Rachmaninov.
Pris par une carrière déjà bien lancée, seul Kevin Amiel manquait à la présentation des solistes de l’Atelier lyrique. Mais le ténor français sera sur le pont avec ses collègues, à l’Amphithéâtre le 15 novembre, pour le concert de rentrée de l’Atelier ; un « Francis Poulenc et ses amis » pour lequel les chanteurs auront été préparés par un éminent spécialiste de ce répertoire : Jeff Cohen. Raison de plus pour ne pas manquer le rendez-vous !
Alain Cochard
Paris, Studio Bastille, 17 octobre 2013
« Francis Poulenc et ses amis »
Œuvres de Poulenc, Durey, Barber
Solistes de l’Atelier lyrique de l’Opéra de Paris
15 novembre – 20h
Paris- Amphithéâtre de l’Opéra Bastille
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Photo : Opéra national de Paris / Mirco Magglioca
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