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"Totale éclate", les Paladins de Rameau selon José Montalvo au Châtelet
Cela devait arriver, c’était fatal, José Montalvo allait venir mettre son joyeux bordel à l’Opéra : avec Les Paladins, il ne pouvait tomber plus juste. Rameau pastiche ses œuvres lyriques dans ce qui reste peut-être son plus brillant divertissement. Il est aussi le plus léger à saisir, on y fait ce qu’on veut avec une facilité déconcertante et cela marche ! On ne va pas vous raconter le spectacle, l’avoir vu une fois ne permet pas d’en saisir toute la suractivité démente qui mêle projections, effets visuels inédits, et une troupe de chanteurs et de danseurs appelée à se démultiplier sur quatre niveaux.
La chorégraphie est échevelée, toute en hip-hop et en smurf, avec des lascars impeccables d’agilité, d’humour et de grâce, Montalvo double souvent les personnages d’un danseur créant ainsi des situations savoureusement décalées. Son délire animalier, commencé dés l’ouverture par une échappée de biquettes, avec notamment sa génération spontanée de lapins surréelle, nous laisse espérer pour demain sa Platée. Il ne s’explique pas, mais superpose tout un monde délirant à celui des ballets qui ne l’est pas moins. Un maître à danser essaye d’enseigner la gestique baroque aux acrobates, mais lui-même est vite gagné par le délire ambiant.
Formidable spectacle, dont le revers de la médaille est peut-être que l’on n’écoute pas assez la musique de Rameau, mais Les Paladins ne sont pas Les Borréades. On ne s’explique toujours pas qu’après tant d’années passées dans l’intimité ramiste William Christie soit si peu attentif à produire des départs ensembles. Dans une partition où tout n’est que prétexte à ballets, c’est un handicap que la virtuosité du spectacle fait oublier. Pour la troupe de chant, dominée de loin par l’Atis de Topi Lehtipuu (souvenez-vous, l’Hylas des Troyens, c’était lui), d’une beauté joyeuse à toute épreuve et au français impeccable, la partie n’est pas aisée : Piau nous faisait une Nérine de chambre, alors que D’Oustrac étincelait en Argie, Schirrer en très petite voix campait un Anselme plus bouffon que dangereux, et Naouri s’amusait franchement en Orcan.
Mais le héros de la soirée fut François Piolino, inventant une Fée Manto déjantée dont on n’est pas près d’oublier et la voix percutante, et le manteau cerné de ballons. La Platée de demain, sans aucun doute.
Jean-Charles Hoffelé
Les Paladins de Rameau, Théâtre du Châtelet, le 14 mai, et les 19, 22, 24, 26, 28 mai à 19h30, le 16 mai à 16 h.
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Photo : MN Robert
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