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Compte-rendu - Mozart à Saint-Céré - une Flûte jeune et légère
Institution pédagogique, « Opéra éclaté » produit des spectacles lyriques dont la vocation est de mettre le pied à l’étrier à de jeunes professionnels. Pour entrer dans les têtes et les corps, l’art se doit d’être répété. Qu’à cela ne tienne ! Toutes les productions du Festival de Saint-Céré, base d’« Opéra éclaté », partent donc en tournée l’hiver suivant à travers la France sur le modèle du fameux « Glyndebourne Opera Tour », versant pédagogique du célèbre festival lyrique de la campagne anglaise. C’est ainsi que la nouvelle Flûte enchantée de Mozart mise en scène par Eric Perez au château de Castelnau joue la carte de la légèreté et de la jeunesse.
Elle nous transporte dans un univers proche de la bande dessinée et du cabaret avec des costumes aux couleurs crues, mais sans faute de goût, signés Jean-Michel Angays et Stéphane Laverne, et des éléments de décor dus à Patrice Gouron suffisamment succincts pour être maniés par les interprètes eux-mêmes. Une Flûte plutôt cacatoès en jaune, bleu, rouge et vert dont le prince sera plus l’oiseleur Papageno que Tamino lui-même, un brin nunuche et engoncé dans le corset de la bonne éducation. On l’a deviné, à Saint-Céré, on a choisi une Flûte de champagne qui pétille plus qu’elle ne réfléchit sur les mystères de l’initiation et des fins dernières. C’est une féerie décomplexée qui a rompu les amarres avec les sous-entendus maçonniques. De la légèreté, vous dis-je.
C’est ce qui s’appelle faire de nécessité vertu car le choix de la légèreté est imposé par la tournée qui suppose des effectifs réduits… comme les coûts. Donc un orchestre de chambre et des chœurs de prêtres discrets renforcés par les solistes eux-mêmes. L’ouverture en souffre un peu, même si l’équilibre vétilleux entre bois et cordes y est préservé au mieux. Mais les instruments sous la direction vif argent du chef Joël Suhubiette portent les chanteurs avec autant de délicatesse que d’efficacité et c’est de la distribution que viennent les joies d’un spectacle qui révèle d’abord des natures et des voix hors du commun sans pour autant nuire à l’homogénéité d’ensemble. On a la joie de retrouver en Reine de la Nuit la colorature turque Burcu Uyar, déjà remarquée au printemps dans Lucia à Dijon : les contre fa et les contre ré ajustés avec une facilité déconcertante trahissent une oreille absolue et une technique de fer.
Sarastro est germanique : Patrick Schramm a le style, le grave des catacombes, la classe des plus grands, un physique rare. Mais pourvu qu’Isis et Osiris protègent sa jeunesse des convoitises des marchands du temple musical ! On en dira autant du Tamino du ténor Raphaël Brémard qui doit prendre son temps. Il y en a deux qui sont d’ores et déjà prêts pour la carrière, c’est la Pamina si merveilleusement musicienne et si bonne actrice de la Tourangelle Marion Tassou et le roi de la soirée, le Papageno du baryton Christophe Gay qui vole littéralement sur la scène dans son grand manteau de plumes abricot. Tous passent sans problème du français des dialogues parlés à l’allemand des airs et des ensembles. Beau travail des chefs de chant : chapeau ! Le reste de la distribution est au diapason à l’exception de la Papagena en retrait et fagotée comme l’as de pique de Sarah Laulan. Une vétille. L’essentiel, c’est l’esprit d’équipe qui anime ces jeunes artistes.
Jacques Doucelin
Saint-Céré, le 2 août à 15 heures.
Prochaines représentations : 6, 9, 13 et 15 août, à 21h30.
La Flûte en tournée : Cahors, 20 novembre, Alençon, 4 décembre, Clermont-Ferrand, 11, Tarascon, 19, Rodez, 21 janvier 2010, Saint-Louis, 23, Blagnac, 30 et 31, Carcassonne, 5 février, Le Chesnais, 12, Ettelbruck, 25, Miramas, 28, Grenoble, 12 et 13 mars, Cognières, 18, Massy, 20, 21, 23 et 24, Garges-les-Gonesses, 28, Rabat, 13 et 14 avril, Casablanca, 15.
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