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Compte-rendu : De Chopin à Alma Mahler - Le Festival de Saint-Céré aux champs
En marge de ses spectacles lyriques comme La Bohème au château de Castelnau, La Belle de Cadix à la Halle des sports de Saint-Céré ou la reprise de la Carmen arabo-andalouse dans la région, ce 30e Festival de Saint-Céré réserve de très jolies surprises sous forme de soirées musicales et poétiques disséminées dans de magnifiques lieux historiques des environs immédiats. C’est le cas de l’hommage à Chopin à l’occasion du bicentenaire de sa naissance, et de l’évocation d’Alma Mahler, une jeune femme de la Vienne du Docteur Freud écrasée par le machisme de son génial mari.
La magnifique et intime cour Renaissance du Château de Montal offre un cadre idéal à la première soirée : élégance, acoustique de rêve et douceur d’un soir d’été. On songe au parc de la maison de George Sand à Nohant dans le Berry. Mises à part quelques transcriptions insipides, deux chefs-d’œuvre composent le programme : la Sonate pour violoncelle et piano, dernière grande pièce de Chopin avant sa mort à Paris, et le Concerto en mi mineur, écrit à Varsovie juste avant le départ pour l’exil.
Lionel Allemand au violoncelle et Patrick Dechorgnat au piano illustrent l’aspect prophétique de cette Sonate sans chercher à en gommer les aspérités, voire les quelques longueurs. Le premier Concerto pour piano est donné dans sa version chambriste avec accompagnement de quatuor à cordes formé de chefs de pupitre de l’orchestre du festival. L’accord est total avec le lieu qui accentue encore l’intimisme de l’interprétation : cinq musiciens en liberté font de la musique en famille pour leur plaisir et le nôtre.
Patrick Dechorgnat assure doublement le lien d’une soirée à l’autre, de Montal à Carennac, en interprétant un Nocturne de Chopin en ouverture du spectacle voué à Alma Mahler avant d’accompagner de son piano un choix de Lieder de Gustav Mahler ainsi que de son épouse chantés par la mezzo-soprano Clémentine Margaine. En fait de parc, c’est plutôt un joli coin de verdure dans un jardin de curé sous les étoiles : écrin de rêve où la comédienne Catherine Walezak va se muer en Alma Mahler grâce à un des six monologues tiré du Saut écrit en 2006 par l’écrivaine hollandaise Anna Enquist.
Pas d’éclat, mais une confidence marquée au sceau du naturel caractérise l’interprétation où règne le goût féminin du détail matériel qui agace et fascine à la fois. Toute la Vienne fin de siècle défile sous la ramée, mais comme traduite, apprivoisée pour le public d’aujourd’hui, à des années-lumière de tout pédantisme. Même les enfants qui font cercle sur des bancs d’écoliers écoutent.
On regretterait presque qu’il n’y ait pas assez de musique, mais il n’est aussi question que d’elle et de la vocation de compositrice frustrée par l’arrogance masculine. On n’a pas entendu le temps passer : c’est l’essentiel… Jusqu’à ce que des rigolos lancent des pétards derrière l’église dont Fénelon fut l’abbé commendataire.
Trop tard ! Alma a bouclé ses valises et ses confidences. Tant pis pour eux.
Jacques Doucelin
30e Festival de Saint-Céré
Chopin : château de Montal, 29 juillet, et château de Labastide-Marnhac, 4 août, abbatiale de Beaulieu, 8 août.
Alma Mahler : parc du château de Carennac, 30 juillet.
Tél : 05 65 38 28 08
www.opera-eclate.com
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Photo : DR
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