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53ème Concours de jeunes chefs d’orchestre de Besançon - Pari sur la jeunesse - Compte-rendu
296 dossiers - un record dans l’histoire de la compétition -, 20 candidats sur la ligne de départ et trois finalistes. Samedi 21 septembre, Huba Hollóköi (32 ans, Hongrie), Kiril Stankow (30 ans, Allemagne), Yao-Yu WU (24 ans, Taïwan) restent en lice pour la dernière épreuve du Concours International de jeunes chefs d’orchestre de Besançon (organisé cette fois avec la participation de l'Orchestre National de Lorraine) au terme de laquelle le jury (présidé par Gerd Albrecht, lauréat du Concours en 1957, et composé de Jacques Mercier, Christian Merlin, Misato Mochizuki, Jorma Panula, Jean-François Verdier et Louwrens Langewoorts), a pour tâche de décerner l’unique Grand Prix tant convoité.
Musubi II, création de Misato Mochizuki dont la résidence à Besançon prend fin bientôt, le premier mouvement du Concerto pour violon de Brahms (avec Olivier Charlier en soliste) et la 2ème Suite (1919) de L’Oiseau de feu de Stravinski forment le menu de la finale pour chacun des concurrents. Menu copieux où l’on doit déplorer l’absence de musique française et, plus largement, latine.
A Kiril Stankow revient d’ouvrir la soirée. Si des échos flatteurs nous parviennent des précédentes épreuves de l’Allemand, force est de constater qu’il n’est pas là au meilleur de ses possibilités. Trac, fatigue ? Il rate sa finale. Misubi II dégage un ennui consommé. Certes bien « tenu », le Brahms souffre d’une conception trop carrée où l’archet d’Olivier Charlier manque totalement d’air. On reste sur faim aussi dans un Stravinski qui, s’il témoigne d’une bonne mise en place, paraît souvent bien pesant, terne et dénué de sens narratif.
Changement total de climat avec Huba Hollóköi : dès la pièce de Mochizuki ont a le sentiment de respirer un bouffée d’air frais – sensation plutôt agréable dans l’étuve d’un théâtre archi-bondé ! Le Hongrois sait jouer avec les timbres et animer le tissu musical de Misubi II jusque dans ses détails les plus infinitésimaux. Violoniste de formation, Hollóköi offre un bel accompagnement dans Brahms, tout à la fois souple et fermement dessiné, où le soliste peut s’exprimer avec naturel, porté par une baguette au métier déjà solide mais, il faut l’avouer, un peu… tristounette à regarder. Après le Stravinski pâteux du premier concurrent, on apprécie les textures bien plus claires, le sens narratif et les couleurs (magnifique Berceuse !) d’un Oiseau de feu pris dans un optique symphonique.
Survient alors Yao-yu WU (photo), qui signe un Misubi II irrésistible de lyrisme et de sensibilité. Radieuse entente que celle qui s’établit ensuite entre le violoniste et le jeune Taïwanais dans Brahms, avec une capacité du chef à accompagner les phrases jusqu’à leur terme. Avec une gestuelle de félin – qui, défaut de la jeunesse, tend à parfois s’enivrer un peu d’elle-même et devra gagner en sobriété – Yao-yu Wu signe enfin le plus chorégraphique et le plus narratif Oiseau de feu de la finale. Un moment de pure magie. Ce retour à l’essence du ballet fait grand effet. Applaudissements très nourris, comme après le passage du candidat Hongrois.
Un choix particulièrement difficile se présente aux membres du jury, entre un candidat ayant passé la trentaine et disposant d’une belle expérience et un autre beaucoup plus jeune, au bagage certes plus léger, mais fort d’un potentiel et d’un charisme incontestables. Après que les Prix du Public et de l’Orchestre ont été attribués à Yao-yu WU, Gerd Albrecht annonce que le Jury a lui aussi fait le pari de la jeunesse en décernant le Grand Prix du 53ème Concours au Taïwanais.
Verdict sévère pour Huba Hollóköi qui aurait pu recevoir le Grand Prix si la majorité du Jury avait penché pour un chef plus expérimenté et qui repart les mains vides. Un dilemme auquel le Concours de Besançon ne pourra échapper qu’en modifiant sa limite d’âge maximum (passer de 34 ans à 26 ou 27 ans) ou un inventant un Second Prix qui soit beaucoup plus qu’un « lot de consolation ». La réflexion est ouverte pour Jean-Michel Mathé, Directeur du Festival et du Concours de Besançon, et son équipe.
Alain Cochard
Besançon, Théâtre municipal, 21 septembre 2013.
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Photo : Yves Petit / De gauche à droite Yao-yu Wu, Kiril Stankow et Huba Hollóköi
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