Fil conducteur du 32^e Festival Chopin, le thème du « Autour de Prélude » a inspiré à Akiko Ebi un programme dense mettant en regard l’Opus 28 du compositeur polonais et le Premier Livre des Préludes de Debussy.

La vision très engagée de la soliste parcourt l’ensemble des 24 Préludes qui prennent sous ses doigts une dimension d’outre-tombe. La main gauche, puissante et profonde, annonce d’emblée un climat fiévreux qui ne retombera pas, même dans les instants où l’angoisse fait place à la mélancolie ou à la romance. Ni calme ni repos dans ce parcours unitaire et organique où le clavier se fait orchestre (Prélude n° 24) tandis que la soliste se montre de plus en plus passionnée au fur et à mesure de l’évolution du cycle. Ce jeu et de ce discours ne nous lâchent jamais.

L’univers debussyste convient tout autant à une interprète aux phrasés souples, aux nuances riches (Les sons et les parfums tournent dans l’air du soir). La technique se place constamment au service de la poésie et du rêve, mettant en mouvement un monde fait de sensibilité, d’irisation, avec une rare maîtrise de l’instrument dans l’alternance entre tension et détente (La cathédrale engloutie). Il ne pouvait pas y avoir plus bel hommage rendu à Aldo Ciccolini dont Akiko Ebi reçut l’enseignement au Conservatoire de Paris. Ce concert était d’ailleurs dédié à sa mémoire.  
 
Michel Le Naour
 
Paris, Orangerie du Parc de Bagatelle, 1^er juillet 2015

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