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Alain Altinoglu et Romain Descharmes à l’Orchestre de Paris - Fête française - Compte-rendu
On guettait avec impatience les retrouvailles d’Alain Altinoglu avec l’Orchestre de Paris, on n’a pas été déçu ! Dès le début de la soirée, España – véritable concentré de bonheur en fa – souligne le plaisir de faire de la musique ensemble. Les timbres pétillent, les rythmes bondissent : tout le parfum, toute la saveur de la fameuse pièce de Chabrier sont là ! Mais quand d’autres parfois tirent l’éblouissement espagnol du truculent Auvergnat vers le clinquant et l’inutilement pétaradant, Altinoglu n’oublie jamais, lui, de laisser respirer la phrase et de soigner les détails de l’orchestration. Ravel admirait Chabrier au plus haut point ; cette vision d’España tend la main justement au maître de Ciboure.
C’est à ce dernier que l’on pense encore en entendant le Concerto n°2 de Saint-Saëns – autre musicien admiré par l’auteur du Boléro - sous les doigts d’un des meilleurs jeunes pianistes français d’aujourd’hui : Romain Descharmes (photo). Le triomphe que lui a été réservé est à la mesure de la classe et de la musicalité avec lesquelles il a interprété l’Opus 22. Pas commode de faire entendre une voix originale dans une partition qui ne supporte pas qu’on surcharge la ligne, qu’on « romantise » le propos. Ici, le soliste assume l’essence classique de la musique, mais sans une once de sécheresse ou de roideur. Servie par une baguette d’une rare attention, Descharmes manifeste toujours une grande souplesse de phrasé. Tout coule de source avec une naturel confondant et, surtout, un raffinement des coloris qui regarde vers le futur ; vers le Concerto en sol de Ravel. Le public ne s’y trompe pas et réserve une longue et chaleureuse ovation au pianiste, qui remercie son auditoire d’une pudique et rêveuse 1ère Barcarolle de Fauré et d’une étincelante étude de Burgmüller.
Reste encore un sacré succès à venir, pour Altinoglu et ses musiciens dans La Tragédie de Salomé de Florent Schmitt. Le jeune chef défend avec passion cette musique à chaque fois qu’il en a l’occasion. Cette longue familiarité fait merveille à La Villette dans une approche qui met en valeur toute l’opulence de l’orchestre du « sanglier des Ardennes » sans tomber dans l’opacité ni l’emphase. L’Orchestre de Paris se régale d’une partition dans laquelle il ne s’était pas plongé depuis quelques lustres. Face à l’enthousiasme du public, la Danse de l’effroi conclusive est bissée ! A quand Antoine et Cléopâtre, Salambô ou, plus modestement, Rêves dans les programmes de l’Orchestre de Paris ou ceux d’autres phalanges parisiennes ?
Alain Cochard
Paris, Cité de la musique, 16 mai 2012
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Photo : Jean-Baptiste Millot
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