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Annecy Classic Festival - Nuits étoilées - Compte-rendu


Remodelé l’an dernier, le Festival international de musique d’Annecy, rebaptisé Annecy Classic Festival, s’est tenu du 24 au 31 août 2011. Le soutien financier du mécène russe Andrey Cheglakov a permis de passer à la vitesse supérieure et de concrétiser des projets déjà engagés en 2010. La venue de Valery Gergiev et de l’Orchestre du Théâtre Mariinsky, de Michel Corboz et son Ensemble Vocal et Instrumental de Lausanne, comme celle de la Philharmonie de Saint-Pétersbourg avec Yuri Temirkanov, sont le témoignage de cette montée en puissance.

Dans le salon élégant de l’Impérial Palace se produisent, pour une nuit du piano, quatre jeunes artistes déjà confirmés. La Coréenne Hyo Joo Lee (28 ans), remarquée en 2003 à Piano Campus, ne convainc pas dans les Préludes op 28 de Chopin dont la continuité lui échappe. A d’autres occasions, cette interprète intelligente et subtile s’était montrée sous un meilleur jour.

En revanche, le Japonais Kotaro Fukuma (29 ans) (photo) est une boule de feu qui enflamme le public dans un programme Liszt abouti. Outre une vélocité à bousculer les montagnes (La Chasse, Ronde des Lutins), il fait preuve d’un sens musical sans faille (La Campanella, Un Sospiro) et d’une fluidité sonore accordée à l’esprit des œuvres.

En fourreau scintillant noir et blanc comme les touches du clavier, la Géorgienne Khatia Buniatishvili (24 ans) impose d’entrée de jeu dans la Sonate en si mineur de Liszt l’éclat d’une personnalité à la vivacité digne d’Argerich. La puissance, la passion, l’autorité qu’elle manifeste sont nuancées par sa tentation narcissique à ralentir dans les moments extatiques. Son tempérament reprend le dessus dans la 1ère Mephisto-Valse, diabolique à souhait mais un rien démonstrative.

Plus contenu, l’Autrichien Ingolf Wunder (26 ans), Deuxième Prix au dernier Concours Chopin de Varsovie, est un véritable styliste (Ballade n°4, Andante spianato et Grande Polonaise brillante de Chopin). D’une assurance qui rappelle, par sa solidité, la posture de Claudio Arrau, l’élégance dont il fait preuve (Soirées de Vienne de Schubert/Liszt), le souverain art de la progression rythmique (Rhapsodie hongroise n°6), offrent des moments de piano d’une splendeur toute olympienne dignes de l’enseignement reçu de son maître, le grand pédagogue polonais Adam Harasiewicz, vainqueur à Varsovie en 1955.

Dans l’Eglise Saint-Bernadette à la tête de l’Orchestre Philharmonique de Saint-Pétersbourg, Yuri Temirkanov, déjà présent en 2010, propose deux concerts romantiques. A une vision idéale, sans pathos, de la Cinquième Symphonie de Tchaïkovski, il confronte une conception très personnelle, énergique et finalement peu germanique de la Quatrième de Brahms où l’humanité l’emporte sur la construction. Le premier soir, le violoniste Renaud Capuçon, apollinien et chambriste dans le Concerto de Tchaïkovski, entretient un dialogue avec cet orchestre de rêve (La Canzonetta jouée sans sourdine, comme le préconise Tchaïkovski, tient de la confidence).

Le lendemain, Denis Matsuev déclenche un torrent d’octaves dans le Concerto pour piano n°1 du même auteur, tel Taras Boulba à la conquête de la steppe. Il sait toutefois mesurer sa force dans les passages les plus lyriques et se faire enjôleur quand il convient de rentrer les griffes. Un véritable succès global pour ce festival si l’on en juge par les ovations du public venu de plus en plus nombreux et conscient, dans ce cadre enchanteur, d’assister à des instants privilégiés.

Michel Le Naour

Annecy, Impérial Palace, Eglise Sainte-Bernadette – 29, 30, 31 août 2011

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Photo : DR

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