C'est à l'héritier français de William Christie, Christophe Rousset (photo), à ses Talens Lyriques et au Choeur de chambre Les Eléments qu'il revenait de clore la 26e édition du Festival de Beaune, en amorçant un nouveau cycle Campra. Du maître aixois, ils avaient choisi pour conclure le Requiem, pièce curieuse et séduisante par sa tonalité plus sereine que la plupart des oeuvres de ce type. Il y faut bien du doigté pour poser ce camaïeu de couleurs souvent gaies, en tout cas méridionales, qui évoquent la lumière de bien des églises du sud de la France. Christophe Rousset, en claveciniste subtil, est un maître coloriste. Il n'a pas son pareil pour traduire l'élégance parfaite de la phrase qui s'étire gracieusement, passant de la joie à la tristesse sans jamais sombrer dans le désespoir. André Campra est maître dans le jeu de l'ombre et de la lumière. C'est tout juste s'il semble s'autoriser une interrogation dans la toute fin de son Requiem.

La soirée s'était ouverte avec des pages encore plus méconnues tirées de son De Profondis que cinq magnifiques solistes surent faire revivre en illustrant la période parisienne du compositeur provençal: les sopranos Céline Sheen, Salomé Haller, les ténors Emiliano Gonzales-Toro, Robert Getchell et la basse Matthew Brook. Ils ne furent pas moins convaincants dans l'austérité du Motet « Quam Dilecta » de Rameau. Austérité toute relative comparée au dépouillement presque lugubre des trois Symphonies pour un reposoir de Marc Antoine Charpentier, des sommets de la musique religieuse au temps du Roi Soleil. Christophe Rousset y est simplement parfait de tact et d'intériorité. Pour conclure la soirée et l'édition du festival de Beaune et pour ne pas rester sur l'interrogation du Requiem de Campra, le chef est revenu en bis à son cher Charpentier pour le plus grand bonheur de l'assistance.

Jacques Doucelin

Festival de Beaune, 27 juillet 2008

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Photo : DR