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Benjamin Millepied quitte la direction du Ballet de l’Opéra de Paris – Nomination d’Aurélie Dupont
Un feu follet ! Il n’est resté que quelques mois à la direction effective du Ballet de l’Opéra: sa nomination par Stéphane Lissner, lors du départ de Brigitte Lefèvre, avait fait grand bruit : séduction, glamour, modernité un peu apprêtée, désir de tout chambouler pour amener un autre souffle. Le nouveau venu a remué la planète danse, sans prendre le temps de lui apporter le changement qu’il souhaitait. Sans doute a t’il sous estimé la force de résistance de la vieille maison, cette force admirable qu’on appelle le patrimoine et l’académisme.
Ce charmant et intelligent franc tireur a sans doute cru qu’il suffisait d’une brise pour arracher quelques racines au vieux chêne de l’Opéra ! Sans succès, car dans la brévissime apparition qu’il a faite lors de la conférence de presse improvisée (1) où lui et Stéphane Lissner - le couvrant d’éloges- ont annoncé sa démission- tous deux ont insisté sur le fait que finalement seule la création et l’acte artistique lui convenaient, et que la lourde gestion de l’institution ne lui permettait pas d’accomplir harmonieusement sa mission ! Sans doute aussi parce que faire danser un corps constitué aussi énorme que le Ballet n’est pas adapté à sa forme de travail, axée sur un petit nombre de privilégiés, de partenaires complices : un travail d’atelier, comme ces groupes « and friends » qui fleurissent partout.
Bref, le voilà soulagé, et enfourchant de nouveau son génie créateur, lequel n’a jusqu’ici montré que des facettes « ravissantes » comme disent les belles dames, souvent d’outre- Atlantique, qui l’ont acclamé. Du talent, incontestablement, une légèreté, de l’esprit et parfois même de la substance, non son ennuyeux et répétitif Daphnis et Chloé en 2014, mais pour sa création en septembre 2015, Clear, Loud, Bright, Forward, qui témoignait d’un début de maturité. C’est sans doute celle-ci qui lui a manqué, il y a deux ans, pour accepter un poste dont il décline aujourd’hui les responsabilités. Sans pour autant briser ses liens avec l’Opéra, puisqu’il continuera d’y faire des créations et d’y donner ses ballets.
Stéphane Lissner, Aurélie Dupont et Benjamin Millepied © C. Leiber - Opéra national de Paris
La boucle est donc bouclée avec l’arrivée dès septembre 2016 d’Aurélie Dupont. Nommée en urgence, l’exquise ballerine, aux adieux tous récents et pur produit intramuros, a clamé haut et fort à la conférence de presse que le Ballet de l’Opéra était « sa »maison depuis toujours, « une vieille dame qu’elle allait respecter en se montrant patiente, et à laquelle elle souhaitait rendre un peu de ce qu’elle lui avait donné » ! Ce qui changera évidemment des directives lancées en tous sens par Millepied. Intelligente, fine, et probablement capable d’une dureté que l’on pressent sous son charme glamoureux, de surcroît rebelle à tout essai de chorégraphie personnelle, elle a redit son amitié pour Millepied, avec lequel elle a toujours eu les meilleures relations du monde, interprétant avec une grâce sans pareille plusieurs de ses chorégraphies.
Décision astucieuse d’ailleurs, car viscéralement attachée à l’héritage classique, auquel elle a affirmé devoir rendre plus de présence et de lustre, Aurélie Dupont défend aussi les avancées de la danse contemporaine, et sans doute les ballets de Benjamin Millepied. Voilà donc le jeune météore devenu lui aussi « une part d’héritage » de cette maison qu’il n’a fait qu’effleurer !
Jacqueline Thuilleux
(1) Palais Garnier, conférence de presse de Stéphane Lissner, Benjamin Millepied et Aurélie Dupont, 4 février 2016.
Photo Benjamin Millepied © Ann Ray
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