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Compte-rendu : Christian Thielemann dirige Beethoven - Oui mais non
La vertu d’abord : cet art de la gestion du temps, qui dédaigne la barre de mesure et augmente les frontières de l’harmonie. Dans une époque de baguettes métronomes c’est devenu quasiment introuvable et donc d’autant plus déconcertant. Mais fascinant aussi, surtout.
Pour ce véritable temps rendu à la musique on voudrait déposer les armes devant l’art de Christian Thielemann. Et cela même si l’on est conscient que son geste est un acte quasiment politique jusque dans sa quête d’une Grande Allemagne mythique. L’ombre de Furtwängler est convoquée, on y croît tout du long au cours d’une Cinquième Symphonie rageuse, emportée, d’un geste uniment sombre qui cloue sur place. On espère presque dans un premier tiers de Pastorale voir le miracle se reproduire, mais non.
Place aux scories : des maniérismes qui se voudraient les ponctuations d’un style mais n’en sont que les faiblesses : rallentendos et decrescendos arbitraires, coquetteries dans les accents, notamment d’étranges soufflets, indifférence aux attaques (au point même que la battue les ignore, elle qui semble toujours espérer que tout va émaner naturellement), et jeu d’ensemble très approximatif. Cette manie du « pas ensemble » pourrait presque passer pour un art si elle n’était si outrageusement sollicitée. Avec cela la haute carrure du chef, au lieu de le pousser à élever musiciens et discours, les enterre. La Philharmonie de Vienne a beau jouer de tous ses charmes, on ne l’aura jamais entendue faire une Septième Symphonie à ce point strictement allemande et par la plus mauvaise pente : quasi caricaturale, lourde, brassée, plombée, elle faisait hélas bien la paire avec cette pesante Pastorale où tout était regardé à la loupe, produisant cet inimitable effet de grossissement un peu flou.
Enfin, comment peut-on ignorer aujourd’hui les apports des éditions historiquement informées ? Même sans coller aux travaux de Jonathan Del Mar, Christian Thielemann aurait pu y jeter un œil. Sa Quatrième Symphonie pataude, ignorant le sforzando, aux harmonies schumaniennes, montrait à l’œuvre un étrange rebours.
Déconcertant. Espérons-le bien vite de retour chez lui, auprès de Bruckner, et de ses deux chers Richard.
Jean-Charles Hoffelé
Beethoven : Symphonies n°4, 5, 6 et 7, Paris, Théâtre des Champs-Elysées, les 24 et 25 novembre 2010. Prochains concerts du cycle Beethoven, les 27 et 28 novembre.
> Programmation détaillée du Théâtre des Champs-Elysées
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